Cyberfraude : les marchands paient les pots cassés
Les achats frauduleux se développent sur le Net. Un chantier de plus pour les marchands qui doivent mener de front deux réflexions permanentes : comment lutter contre la fraude, et renforcer la relation de confiance avec leurs clients.
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Alarmiste : le dernier bilan de la fraude en ligne dressé par Fia-Net,
spécialisé dans l'assurance des transactions sur Internet, conclut à une forte
aggravation de la situation. Pour l'année 2001, l'assureur a recensé presque 3
500 cas de fraudes, pour un montant total de plus de 1,3 million d'euros, à
partir des déclarations de sinistres de son portefeuille de clients. A
échantillon constant, entre l'année 2000 et 2001, la croissance des délits
s'élève ainsi à 443 %. « En 2000, nous étions optimistes. Nous avions conclu
que la fraude restait maîtrisable. Cette année, la tendance s'est inversée,
précise David Botvinik, Dg de Fia-Net. Mon sentiment est que les fraudeurs se
sont professionnalisés. Nous sommes souvent face à des réseaux organisés, pour
lesquels Internet n'est pas un lieu de piratage des cartes bancaires, mais un
nouveau débouché pour une délinquance classique. » L'arnaque est basique : les
fraudeurs utilisent des cartes ou des numéros volés dans le réel, et s'en
servent pour faire des achats on line. Le porteur de la carte est remboursé de
ce débit illicite par sa banque, et le marchand floué rembourse à la banque la
somme engagée. Pour 20 % des cas, les fraudes recensées sont d'ailleurs le fait
de clients malhonnêtes qui commandent en ligne un article avec leur propre
carte et déclarent ensuite ne l'avoir jamais fait. C'est un autre type de
fraudes, ponctuelles mais bien réelles pour les commerçants. Selon Fia-Net,
plusieurs marchands auraient ainsi fermé boutique suite à des attaques ciblées
de fraudeurs. PC City France a estimé, par exemple, sur les premiers mois de
l'année 2002 que la fraude représentait 8 % de ses ventes. Un coût bien réel,
doublé de celui engendré par les investissements, humains ou logiciels,
nécessaires à la détection des fraudeurs. De plus, le panier moyen des
fraudeurs a augmenté, passant de 340 euros en 2000 à 390 euros en 2001.
Quid du consommateur ?
L'aggravation de la fraude
concerne ainsi directement les cybercommerçants, mais ne touche
qu'indirectement les consommateurs français, protégés par la législation. « Il
ne faut pas confondre la fraude subie par les marchands et celle subie par le
particulier, rappelle Christian Perrier, associé de PriceWaterhouseCoopers et
spécialiste de l'e-commerce. Le consommateur est très protégé. Il ne faudrait
pas que l'amalgame se fasse entre l'achat sécurisé en ligne, absolument pas
remis en cause, et les agissements de fraudeurs qui utilisent des numéros issus
de facturettes ou de cartes volées. » Le groupe de réflexion "E-commerce pour
tous", créé en mars 2001 par de grands marchands en ligne (voir Marketing
Direct n° 54, p. 37) a pour objectif de renforcer la relation de confiance avec
les cyberconsommateurs. Le groupe a rejoint l'association pour le commerce et
les services en ligne, Acsel, et en constitue désormais une commission de
travail. « Evitons de faire circuler des propos alarmistes, remarque Gérard
Ladoux, secrétaire général de l'Acsel. Nous avons, par exemple, préconisé que
les banques renforcent la protection du consommateur, en diminuant les délais
de remboursement du porteur en cas de fraudes. » Ainsi, La Société Générale
rembourse depuis décembre 2001, dans un délai de 7 jours, le porteur de carte
spolié et a mis en place un numéro d'appel spécifique, en cas d'utilisation
frauduleuse d'une carte. Même si l'e-commerce affiche une certaine santé, avec,
selon l'Acsel, une croissance affichée de 56 % entre les débuts 2001 et ceux
2002, l'Internet marchand a toujours à combattre deux obstacles bien ancrés.
Premier grand chantier : la lutte contre la fraude. En attendant que la
signature électronique s'impose, les marchands se protègent en analysant les
commandes de leurs clients ou en recoupant les données de livraisons et de
paiement. Fia-Net a convaincu 250 marchands de participer à son nouveau système
d'analyse des commandes, qui recoupe les informations portées sur les bons de
commande issus des participants et les cas de litiges. Par exemple, un acheteur
qui, pour la même carte, a utilisé plusieurs adresses de livraisons
différentes, sera aussitôt repéré. Deuxième travail de longue haleine des
e-commerçants : la confiance consommateur. Le groupe "E-commerce pour tous"
veut renforcer le poids de l'une des marques de confiance de l'e-commerce,
L@belsite, le sceau créé en 1999 à l'initiative de la Fevad (Fédération des
entreprises de vente à distance), et de la FCD (Fédération des entreprises du
commerce et de la distribution). « Nous voulons construire un label de
référence, qui soit visible, compréhensible par tous et reconnu », explique
Gérard Ladoux.