« Le Web représente déjà 10 % des commandes d'Eveil & Jeux »
Filiale à 100 % du groupe PPR, le groupe Eveil & Jeux fait partie, avec les magasins Fnac Junior, du Pôle Enfant Fnac. Son directeur adjoint fait le point sur la stratégie de ce groupe qui compte prendre une position de leader sur le marché des produits culturels pour enfants.
Je m'abonneComment est né le Pôle Enfant de la Fnac ?
Il
s'agit en fait de deux enseignes. Eveil & Jeux, qui commercialise ses produits
par Internet et par catalogue, sans oublier un corner dans le cadre du
Printemps Haussmann, du 1er novembre au début janvier. Et Fnac Junior, un
réseau physique de magasins. La création du Pôle Enfant est une décision du
groupe PPR consistant à rapprocher les deux enseignes pour en faire un pôle
multicanal. C'est un pôle à inventer, une initiative en construction, née de la
constatation que ces deux enseignes avaient des missions proches. Il était
naturel que la problématique de la mise en commun des savoir-faire se pose.
Reste qu'il est encore un peu tôt pour en dire plus. Fnac Junior, ce sont
dix-huit points de vente, et nous comptons en ouvrir une dizaine en 2002. Le
but, c'est que le pôle atteigne le milliard de francs d'ici trois ans.
Quelles sont les caractéristiques du groupe Eveil & Jeux ?
Eveil & Jeux a été créé en 1989 par Gilbert et Margaret Milan.
L'idée de base était de trouver une alternative aux jouets distribués en Grande
Distribution. Et pour ce faire, de proposer des jouets qui ont de la valeur
dans les relations parents enfants, qui permettent de faire grandir l'enfant.
Dans cette optique, l'apprentissage de l'enfant est vu au sens
d'épanouissement. Au départ, le catalogue s'adressait aux 2 - 6 ans, de la
maternelle au début de la lecture. Très vite, l'entreprise a grossi. Et le
catalogue s'est étoffé. Aujourd'hui, il compte 70 pages. Et touche maintenant
les 2 - 14 ans. La croissance s'est nourrie de la création, en 1995, d'un
catalogue spécifique pour les 0 - 3 ans : Graine d'Eveil. Une offre de jeux,
mais aussi d'objets astucieux de puériculture. Enfin, le rachat, en 1998, du
catalogue Bien Joué ! nous a permis d'étoffer notre offre.
Comment segmentez-vous votre offre ?
En 2001, nous avons orienté le
catalogue Bien Joué ! vers une complémentarité avec Eveil & Jeux. Désormais,
Bien Joué ! ne présente plus de jouets, mais de la décoration et des idées
pratiques pour la famille. Des bacs de rangement, des sacs à linge, des
accessoires de salle de bains ou encore de la décoration pour les chambres
d'enfants. Bien Joué ! doit être compris dans le sens "Bien Trouvé !", "Bien Vu
!". La marque a suivi l'évolution du concept. Cette année, avec ces trois
catalogues, nous avons réalisé un chiffre d'affaires de 430 millions de
francs.
Quels moyens de communication utilisez-vous ?
Le premier outil, c'est le catalogue, distribué à 18 millions d'exemplaires.
Puis, la présence dans la presse enfants : Bayard, Milan, Fleurus, PlayBac et
Disney. Mais aussi dans la presse familiale, Famili, Parents, Enfants Magazine,
où nos produits sont souvent repris dans les pages Shopping ou Nouveaux
Produits. Nous n'utilisons ni la publicité TV, ni la radio, ni l'affichage.
Eveil & Jeux a procédé à de nombreux partenariats. Nous sommes impliqués avec
des sociétés susceptibles de collecter des adresses. La presse jeunes parents,
par exemple.
Qui touchez-vous ?
Ce ne sont pas
forcément des CSP + (cadres urbains à hauts revenus). Ce critère n'est pas
discriminant. Nous recherchons des parents qui se sentent impliqués dans
l'éducation de leurs enfants. Nos produits se vendent aussi bien auprès des
institutrices que des cadres. Le critère socio-démographique est un
sous-ensemble, bien que nos clientes soient plutôt urbaines.
Quels sont les modes de commande ?
Les commandes par téléphone sont
majoritaires, puis le courrier, l'Internet, le Minitel et le fax, dans un ordre
décroissant. Nous disposons d'un centre d'appels à Cergy-Pontoise, en propre.
Il est constitué d'une équipe de 30 personnes, avec une pointe à 250 personnes
dans les mois qui précèdent les fêtes de Noël.
Quel est le panier moyen ?
En 2000, Eveil et Jeux a réalisé plus d'un million de
commandes, pour un panier moyen de 400 francs environ.
Comment trouvez-vous les produits que vous commercialisez ?
C'est un
processus très rigoureux.
Le premier filtre, c'est l'oeil des acheteuses. Elles sont huit. Une population
très féminine et jeune puisque la moyenne d'âge est de 30 ans. Ensuite, les
jeux sont envoyés dans notre réseau de parents pilotes, un ensemble de familles
volontaires, qui les testent pendant une semaine. Nous cherchons à voir s'ils
sont vraiment utilisés. Les parents disposent d'une grille détaillée pour juger
les produits.
Les événements du 11 septembre dernier ont-ils eu un impact sur vos commandes ?
Il y a eu un effet, mais temporaire.
Pendant une semaine, juste après, nous n'avons reçu aucun coup de téléphone. La
semaine suivante, les commandes par Internet le soir ont été moins importantes.
Mais il n'y a pas, comme en 1995, de crainte d'aller dans un endroit public et,
de plus, le budget cadeau pour les enfants ne devrait pas souffrir de ces
événements.
Comment s'effectuent les livraisons ?
Les
clients ont le choix entre quatre modes de livraison. Dans un des 3 000 relais
colis partagés avec La Redoute, à domicile, en 24 ou 48 heures, ou par courrier
normal. 70 % des colis sont livrés en 48 heures ou moins.
Et l'Internet ?
Les commandes par Internet sont plutôt passées vers
23 heures le soir. Le rythme d'adaptation aux nouvelles technologies s'accélère
et beaucoup de clientes basculent sur Internet, ce qui nous fait faire des
économies. L'Internet prend de plus en plus de place. L'an dernier, ce canal ne
représentait que 13 millions de francs sur un chiffre d'affaires de 385
millions. En 2001, ce chiffre a été multiplié par trois. L'Internet est à la
fois un moyen de commande, un mode de recrutement et un nouveau champ
d'investigation. Cependant, le Web représente déjà 10 % des commandes. Nous
poussons l'utilisation de l'Internet par nos clients car c'est un canal très
intéressant en termes de productivité.
Comment est animé le site ?
Il y a une partie éditoriale, qui met en ligne des dossiers, et
sert de relais à des associations amies. En septembre, nous présentions un
focus sur la rentrée à l'école. Avec des réponses aux questions que se posent
les parents. Ou encore, par exemple, un dossier destiné aux parents de
nationalités différentes. Nous présentons aussi des offres commerciales.
Systématiquement, nous demandons à l'internaute de laisser son adresse e-mail,
afin de lui envoyer notre newsletter. Celle-ci, mensuelle, est unique au
groupe, elle propose des contenus et des offres spécifiques. Elle compte 70 000
abonnés. Si la conception du site est réalisée en interne, c'est un prestataire
extérieur, WizMail, qui gère les envois d'e-mails.
Est-ce un site unique ?
En fait, nous disposons de trois sites, correspondant à
nos trois catalogues, mais on peut facilement migrer d'un site à l'autre. Notre
force, c'est un moteur de recherche qui va au-delà de l'âge de l'enfant. On
peut poser des questions simples telle que « Quels sont les jeux pour apprendre
? » De plus, le check out est unique pour les trois sites. La base de données
marketing est commune aux trois sites, avec les mêmes fonctionnalités. Ce qui
permet à nos clientes de mélanger dans un même panier les objets commandés sur
les sites. Enfin, les internautes peuvent enregistrer des articles sans pour
autant les commander, et les "mettre dans un coin". Ils bâtissent un catalogue
personnel qu'ils peuvent utiliser lors d'une session ultérieure.
Pour vous, que représente l'Internet ?
C'est un nouveau
canal de vente en plus. Nous avons préféré l'aborder en y calquant les services
de la vie réelle dans un premier temps. L'Internet est le début d'une histoire.
Il permet de disposer d'un grand nombre d'informations sur les clients mais il
est difficile de les structurer. Reste que nous commençons à proposer des
produits en complément des commandes, en fonction de ce qui a été commandé,
grâce à des analyses data mining. Nous sommes encore en phase de tests et nous
n'utilisons ces techniques qu'avec nos produits.
Comment est constituée votre base de données marketing ?
Elle compte un
million trois cent mille clients et huit cent mille prospects, recrutés à
partir de coupons presse ou par Internet. Elle est unifiée sur tous les canaux,
Minitel, Internet, mailings. Et regroupe tous les clients du groupe Eveil &
Jeux.
Comment organisez-vous vos campagnes ?
Nous
avons quatre campagnes principales par an. Printemps, été, automne, Noël pour
les catalogues Eveil & Jeux et Graine d'Eveil. Et deux campagnes, au printemps
et à la rentrée pour Bien Joué !. Reste que la France est un pays où les gens
commandent peu de jouets en dehors de Noël. C'est pourquoi nous cherchons à
fidéliser nos clientes en sortant un catalogue supplémentaire lors de la
période du carnaval, afin de relancer les ventes printemps/été. Le catalogue
Graine d'Eveil ne répond pas à la même saisonnalité qu'Eveil & Jeux, car les
naissances sont également réparties dans l'année. C'est pourquoi nous envoyons
quatre vagues de 1,6 million de catalogues par an.
Etablissez-vous des partenariats ?
Nous ne partageons pas nos fichiers. Néanmoins
nous hébergeons des offres de partenaires. Par exemple, à la rentrée, une offre
Fnac sur des livres scolaires.
En matière d'e-mailing, quelle stratégie préconisez-vous ?
Nous sommes plutôt favorables à
l'option "opt-out". Mais nous avons peut-être une vision faussée par
l'encombrement de nos boîtes aux lettres. Nos clientes ne reçoivent pas 50
e-mails par jour, comme nous dans un cadre professionnel. Cependant, il faut
définir des règles de conduite au niveau du poids des messages. Le plus
dissuasif, c'est la mécanique des envois. Nous sommes face à des entreprises
qui veulent faire de la croissance à tout prix et qui ne pensent qu'à recruter
des adresses e-mails.
Quelles autres actions menez-vous ?
Nous sommes une entreprise citoyenne. En juillet 2000, nous
avons créé la Fondation Eveil & Jeux, dont Margaret Milan assure la présidence.
Son objectif est de soutenir les projets liés à l'éveil des enfants et aux
activités parents/enfants dans les quartiers difficiles. Des quartiers en
contrat de ville et en Zone d'Education Prioritaire (ZEP). Elle se concentre
sur des projets à taille humaine. Comme, par exemple, la création d'une
ludothèque à Evreux.
Biographie
Guillaume Motte, 30 ans, est Centralien, diplômé de l'Insead et de Cambridge University. En 1993, il est analyste financier à la BNP Londres. De 1995 à 1999, il est consultant chez McKinsey Paris. Il rejoint Eveil & Jeux en 1999 comme directeur du développement et de l'exploitation, et devient directeur adjoint du Pôle Enfant de la Fnac en 2001.
L'entreprise
Eveil & Jeux a vu le jour en 1989. Filiale à 100 % de PPR, le groupe Eveil & Jeux fait partie du Pôle Enfant Fnac, né du rapprochement des enseignes Eveil & Jeux et Fnac Junior. Trois catalogues : Eveil & Jeux, Graine d'Eveil et Bien Joué !. L'entreprise dispose de quatre canaux de distribution : VPC, Internet, Minitel et centre d'appels. Chiffre d'affaires prévisionnel 2001 : 65,5 Me (58,7 M€ en 2000). Panier moyen : 61 euros Effectif du centre d'appels : de 30 à 250 personnes.