« La vente directe est un canal de distribution majeur »
Avec près de 4 millions d'abonnés, Wanadoo pèse à lui seul 40 % du secteur des FAI. Pour garder son avance sur la concurrence, la filiale de France Télécom doit toujours améliorer ses modèles marketing direct. C'est le challenge que doit relever Philippe Bonnaudeau, responsable vente directe, et son équipe composée d'un pôle marketing direct, d'un pôle téléphone et d'un pôle Web.
A quelle époque a été lancée l'activité vente directe de Wanadoo ?
Dès le lancement de Wanadoo en 1996, la vente directe a
été considérée comme un canal de distribution majeur, aux côtés des autres
canaux. Le premier est constitué par les agences France Télécom. La grande
distribution (Carrefour, Auchan...) constitue le deuxième canal où nous sommes
référencés comme tous les autres produits. Troisième canal : les petits
professionnels, les revendeurs informatiques, les agences France Télécom
Entreprises, qui ciblent les clients professionnels. Enfin, dernier canal : la
vente directe, qui représente 30 % des ventes.
Quelle est votre approche du marketing direct ?
Nous mobilisons toutes les
ressources du marketing direct. Chez Wanadoo, l'acte de vente se fait en une
fois : nous commercialisons un abonnement. Nous essayons de faire en sorte que
nos prospects se transforment en clients... Nous sommes plutôt dans le one-shot
comme tous les autres providers, ce qui nous différencie des grands vépécistes,
par exemple. Notre marketing direct s'appuie sur la diffusion d'un kit : un
CD-Rom de démonstration, qui permet de s'abonner. Tous nos stimuli sont
marketés autour de ce kit. Nous le diffusons dans la presse grand public (collé
ou jeté en 1re ou 4e de couverture). En fonction du titre de presse, nous
ciblons des catégories de prospects. Nous le diffusons également dans la presse
informatique.
Vos autres supports de diffusion ?
Nous
utilisons également l'ISA : le kit est mis directement dans les boîtes aux
lettres, ciblées selon des critères de géomarketing, afin de mieux nous
rapprocher de notre cible. Le quatrième outil est le mailing adressé. Nous
louons des fichiers avec un travail de ciblage important. Il y a cinq ans, nous
visions les personnes équipées de micro-ordinateurs. Aujourd'hui, nous ciblons
les internautes. Nous louons des fichiers, qui ont des adresses e-mails, telles
les bases de données comportementales (Consodata, iBase...). En ce qui concerne
les adresses e-mails, nous commençons à avoir du volume, de la qualité. Une
fois les fichiers loués, le travail commence par des opérations de
dédoublonnage avec nos bases clients. Notre objectif est de faire en sorte que
nos adresses soient les bonnes. Compte tenu du coût de l'adresse et du prix
du timbre, qui
sont deux postes de coûts, auxquels il faut ajouter celui de l'asilage, le taux
de retour d'un mailing adressé doit donc être bien meilleur. Le kit est
toujours dans le mailing, nous sommes obligés de le fournir. Car aujourd'hui,
un internaute qui souhaite s'abonner ne veut pas attendre une huitaine de jours
son mot de passe, ni son login. Il veut pouvoir le faire tout de suite. Les
abonnements connaissent une forte saisonnalité, et sont réalisés au premier et
quatrième trimestres de l'année. Ils suivent la courbe des ventes des
micro-ordinateurs. Pour compléter les modes de diffusion du kit, Wanadoo
pratique également l'asile-colis. Nous l'avons testé dans les catalogues de
vente de CD-Rom, La Redoute, les 3 Suisses, Dial, Alapage, la Camif, dans le
consumer du Club des Actionnaires de France Télécom. Nous avons donc une
palette très vaste. Au total, 50 millions de kit sont diffusés par an.
Et les médias de retour ?
Le kit lui-même constitue une
voie de retour, car il permet de s'abonner directement. Il n'y a pas besoin de
formulaire papier. La deuxième voie de remontée de l'information est constituée
par le téléphone, qui est un élément central de notre dispositif. Car, à chaque
fois que Wanadoo distribue un kit, le choix du mode d'abonnement est proposé :
soit sur le kit lui-même, soit par téléphone, soit sur le site Wanadoo. Nous
avons installé des numéros de téléphone sur chaque type de support, dans un
souci de pouvoir tracer toutes nos actions. Au total, nous avons une
cinquantaine de numéros de téléphone. La réception des appels, soit 1 million
d'appels par an, est gérée par Teleperformance et Armatis. Avec le téléphone,
nous constatons des taux de transformation assez bons. Car c'est le seul canal
de retour où il y a un être humain. Avant de s'abonner, l'internaute peut avoir
besoin d'approfondir une question, d'être conseillé sur les différentes
offres... Car il faut faire son choix : Wanadoo propose trois forfaits haut
débit eXtense ; dans l'offre intégrale, il y a 5 choix possibles, et puis il y
a des services à la carte : la formule "Accès libre".
Envisagez-vous de faire de l'émission d'appels ?
Nous
pratiquons l'émission d'appels en prospection, à partir de fichiers loués. Nous
le faisons de façon plus généralisée depuis le début de l'année 2002. Ce qui
donne des retours tout à fait convenables.
Qu'en est-il aujourd'hui de l'abonnement sur le site web ?
Effectivement, le site
wanadoo.fr propose un espace "abonnez-vous". Cinq millions de visites y sont
enregistrées. Par rapport au mailing papier, nous disposons de plus de place.
Nous essayons d'accompagner le client pour l'aider à faire son choix. Par
exemple, nous avons installé un petit module qui comprend une dizaine de
questions très simples. Lorsque l'internaute y a répondu, nous lui proposons
l'offre qui lui convient le mieux. Autre exemple : nous avons un module qui
permet de comparer nos offres. Il est possible de s'abonner directement sur le
Web, comme sur le kit. Mais l'internaute peut aussi appeler un numéro de
téléphone (un Numéro Azur). Nous essayons de mettre sur le Web beaucoup de
réactivité et de créativité, nous sommes en permanence en train d'enrichir le
site. Et nous mesurons le niveau d'audience de chaque rubrique. Le design du
site est assuré par Victor & Associés.
Parmi vos différents modes d'abonnement, quelle part représente Internet ?
Ce n'est pas la
part la plus importante, mais celle dont le poids augmente le plus. L'avantage
d'Internet, c'est de ne pas être limité par le support. Aujourd'hui, c'est ce
média qui offre le coût d'acquisition le moins élevé. Par ailleurs, nous
mettons en place un certain nombre de partenariats avec des sites marchands,
des sites de communauté (Kelkoo...). Nous allons tracer tous les abonnements
réalisés avec eux et ils seront rémunérés à l'abonnement réalisé. En outre,
nous commençons à développer des actions pro-actives. Nous réfléchissons à une
campagne d'e-mailing. Nous souhaitons développer le Web, mais nous attendons
les résultats des actions que nous lançons. Nous sommes plutôt en phase de test
qu'en phase de généralisation.
Vous pratiquez également le parrainage...
Progressivement, nous passons du parrainage papier
au parrainage sur le site. Dans l'espace personnel "Wanadoo et moi", il est
possible de parrainer directement sur le site. Le client doit simplement donner
son identifiant personnel. 100 % de la prime revient alors au parrain : un mois
offert sur son forfait ainsi qu'un bon d'achat Alapage. Nous avons essayé de
simplifier la démarche pour qu'elle soit plus ergonomique, sinon le parrain
risque d'abandonner en cours de route. Depuis l'été dernier, Wanadoo s'appuie
également sur le marketing viral. Il est possible d'envoyer à son carnet
d'adresses une "e-card" potentielle ; c'est le parrain qui l'envoie. Nous
misons beaucoup sur cette formule. Pour l'instant, les premiers résultats sont
encourageants. Ce sont des opérations dont les coûts sont très faibles. A vrai
dire, nous continuons le parrainage papier mais uniquement avec du scoring, sur
la base de nos parrains actuels, qui sont plutôt des adeptes du haut débit. Ce
sont des forfaits qui sont plus chers (en moyenne, 45 euros par mois), mais la
prime est aussi plus élevée.
Que vous apporte le traçage de vos opérations ?
Nous traçons de façon exhaustive l'ensemble de nos
actions pour mesurer leur impact, afin de modifier les paramétrages pour
optimiser les coûts. Car notre objectif est d'avoir le coût d'acquisition le
plus bas possible. Par exemple, ce n'est plus un secret en personne : la presse
informatique fonctionne moins bien qu'il y a cinq ans, car en fait ses lecteurs
sont tous abonnés à Internet. Une campagne de kit dans la presse économique a
un coût important, il faut donc bien mesurer nos actions. Dans ce domaine, il y
a des choses qui marchent bien à une époque et moins bien à une autre.
Quelles actions menez-vous envers ceux qui résilient leurs abonnements ?
Nous fonctionnons comme la téléphonie mobile. Il y a
tacite reconduction de l'abonnement et, lorsque le client veut le résilier, il
doit nous adresser un courrier. Concernant la résiliation, il y a quelques
points sur lesquels nous essayons de réfléchir. Nous avons en propre un certain
nombre d'adresses de personnes qui ont résilié, et nous travaillons à les
reconquérir par des méthodes de scoring. Nous les travaillons par mailing et/ou
phoning en appels sortants. Nous essayons de connaître leur motif de
résiliation, de connaître leur canal d'abonnement d'origine. La difficulté est
d'avoir le fichier d'origine le plus enrichi possible. En termes de traitement
de fichiers, nous nous appuyons sur Wanadoo Data. Sur 10 millions
d'internautes, 6 millions ne sont pas des abonnés Wanadoo. Pour une grande
partie, ceux qui nous quittent pour partir à la concurrence sont attirés par
les offres qu'elle propose. Sur les 6 millions d'adresses potentielles que nous
ciblons, il y en a une partie qui était chez nous auparavant... Notre objectif
principal est de garder notre avance sur la concurrence. Nous devons toujours
être à la recherche de l'opération la plus performante. En fait, nos grands
objectifs sont de réussir les opérations pro-actives sur le Web et d'affiner
nos plans fichiers par le scoring. Chez Wanadoo, on doit toujours améliorer les
modèles marketing direct.
Quelles autres pistes souhaitez-vous explorer ?
Nous réfléchissons à constituer une base de données de
prospects qui sont venus sur le Web. Accepteraient-ils l'idée de laisser leur
adresse e-mail ? Quand on a 5 millions de visites sur un site, il faut trouver
des moyens de garder le lien.
Faites-vous appel à des agences de marketing direct ?
Après avoir travaillé au lancement de Wanadoo
avec l'agence de Pascal Beytout, Actions Direct - qui s'appelle désormais
Encore Eux -, c'est désormais ETO qui assure une grande partie de la création
des mailings, du kit...
Biographie
Agé de 45 ans, fonctionnaire, Philippe Bonnaudeau est entré à France Télécom en 1990 comme responsables des études grand public et du Minitel. Depuis 1996, il est responsable de la vente directe de Wanadoo.
L'entreprise
Fondée en 1996. Filiale de France Télécom. Chiffre d'affaires 2001 : 1,6 milliard d'euros. 918 millions d'euros au premier semestre 2002. Effectif : 7 000 personnes dans six pays. 3,7 millions d'abonnés en France. 4 millions prévus fin 2002.