« Internet est pour nous un succès naturel »
A son lancement, Banque Directe avait axé son développement sur le thème de la banque par téléphone. Mais les choses ont évolué et la banque à distance a pu tirer parti de l'arrivée d'Internet. Aujourd'hui, le Web est devenu son premier canal de contacts. Récit de cette évolution avec Marc Lanvin, directeur Internet et marketing direct de Banque Directe.
Retracez-nous les débuts mouvementés de Banque Directe ?
La Banque Directe est née en septembre 1994, avec comme concept
d'être une banque de particuliers par téléphone, selon le modèle anglo-saxon.
Ce fut un énorme succès d'estime et d'impact. Les banques françaises ont eu
peur, notamment par rapport au fait d'être disponible 24 heures sur 24. C'est à
partir de cette époque qu'elles ont étoffé leur plate-forme téléphonique et
leurs horaires. Mais le décollage fut plus lent que prévu. Les raisons à cela :
les Français étaient déjà très bancarisés et contents de leur banque. D'autant
qu'en matière de banque à distance, il y avait déjà le Minitel. Nous avons
réfléchi à une diversification des canaux. Replaçons-nous dans le contexte de
l'époque. Il y avait alors deux pistes : les autoroutes de l'information et les
bornes interactives. C'était le mythe de la visiophonie et nous avions commencé
à installer des bornes... Finalement, cette piste a été abandonnée, et Banque
Directe a été l'un des premiers à lancer, en 1997, un site internet
transactionnel et gratuit. Il a été très bien accueilli par le petit monde de
l'Internet de l'époque. Nous avons gagné des récompenses lors de remise de prix
spécialisés dans ce domaine. Du coup, nous avons investi, cela nous a
rasséréné, et les premiers bandeaux datent de cette époque.
A quel moment a eu lieu le décollage sur le Web ?
La rupture date de
1999, en raison de plusieurs phénomènes. Le 1er février 1999, pour la première
fois, le nombre de connexions clients sur Internet a dépassé celles effectuées
sur le Minitel, puis en juin-juillet, le nombre de contacts web a dépassé le
téléphone. Internet est devenu le canal numéro un de connexion avec la banque.
Entre décembre 1999 et janvier 2000, le Web a représenté plus de 50 % des
contacts. En fait, ce n'est pas un phénomène que nous avons produit. C'est en
quelque sorte un phénomène naturel. Nous avons donné un canal supplémentaire à
nos clients, ils s'y sont engouffrés. Car notre client type est dans la tranche
des 25-50 ans, de CSP +, et c'est un urbain ; un profil qui constitue le coeur
de cible des premiers internautes.
Quel type d'opérations peut-on effectuer sur le site ?
Il permet de consulter son compte, de
faire des transactions, de personnaliser ses pages, d'accéder à la bourse en
ligne. Il est également possible d'ouvrir un compte en ligne, de faire du
parrainage, d'accéder au catalogue de cadeaux. Tout cela, sans intervention
humaine. Banque Directe a investi 100 MF dans la mise en place d'un système
d'information, qui permet de gérer tout le CRM multicanal en temps réel. Ce qui
implique que le client qui appelle, quel que soit le canal, dispose d'une
information fraîche. Par ailleurs, dans ce domaine, Banque Directe possède un
atout majeur dont ne disposent pas les autres banques : un traitement vraiment
professionnel du mail, avec un temps de réponse maximum de deux heures. Les
mails sont traités par une équipe dédiée, basée sur le plateau téléphonique.
A quelle fréquence vos clients se connectent-ils sur le Net ?
Nos clients viennent en moyenne 7 fois par mois sur le site
Banque Directe (www.banquedirecte.fr). Et le nombre de connexions clients sur
Internet augmente de 10 % chaque mois. Parallèlement, le Minitel est en chute
libre. En fait, nous avons beaucoup plus de contacts avec notre clientèle,
grâce à Internet. L'écrit apporte quelque chose en plus. D'une façon générale,
nos contacts avec les clients sont de meilleure qualité. Car les outils
automatiques que nous avons mis en place déchargent les 80 téléopérateurs des
tâches répétitives. Banque Directe n'a plus besoin d'avoir cette image de
"batterie de téléopérateurs qui répondent à la chaîne"...
A quoi attribuez-vous cette montée en puissance d'Internet ?
Nous en
sommes à notre quatrième ou cinquième version du site... Nous avons donc du
recul, nous avons acquis une certaine expérience progressivement... Sur
Internet, il y a beaucoup d'informations qui circulent. Certains de nos
premiers clients, internautes de la première heure, nous ont donné des conseils
pour l'améliorer... En fait, Internet est un succès naturel pour nous, car nous
sommes "pile-poil" dans la cible des internautes.
Comment avez-vous procédé pour faire connaître le site ?
Par nos campagnes
de bandeaux, par le rappel de notre adresse internet sur tous nos courriers ;
toutes nos opérations de marketing direct font référence au site... Et puis, il
faut ajouter une forte popularité : 350 sites "pointent" le site Banque
Directe.
Quelle est votre politique de partenariat ?
En décembre dernier, la banque a conclu un partenariat avec Yahoo France, qui
permet aux clients de consulter le solde et les derniers mouvements de leur
compte depuis "Mon Yahoo", service réservé aux gros utilisateurs de Yahoo.
Depuis, nous avons passé également un accord avec Spray, qui propose à nos
clients une connexion gratuite à Internet. En outre, nous sommes présents dans
la boutique Multimania et dans la boutique Shop+ de Canal+. Comme dans la vie
réelle, nous sommes présents dans les galeries commerciales virtuelles... Pour
tout ce qui concerne le crédit automobile, Banque Directe a également comme
partenaire Autovalley.com. Nous réfléchissons actuellement à d'autres services
de ce genre. Comme hébergeur et Web agency, nous travaillons avec Fluxus.
Comment recrutez-vous vos nouveaux clients ?
En termes
de recrutement, le parrainage et Internet sont montés en puissance depuis
janvier 2000. Aujourd'hui, nous avons trois canaux à peu près égaux : le
mailing, le parrainage et Internet.
Combien de clients possèdent Banque Directe ?
Nous avons 75 500 clients et 100 000 comptes. La
majorité d'entre eux y ont domicilié leur salaire.
En ce qui concerne les opérations de mailing, quelle est votre politique ?
Nous essayons de ne pas être trop intrusifs. Nous écrivons à nos clients trois
fois par an, plus des inserts dans les relevés de compte. Quant à la
prospection par mailing, cette année nous effectuons plus de 2 millions
d'envois. Pour cela, nous louons des fichiers d'abonnés de journaux, qui
correspondent à notre cible ; nous utilisons aussi les mégabases (Consodata,
Claritas). A chaque grosse opération, nous mettons des agences en compétition.
Pour les dernières actions, nous avons travaillé avec Communider et Start-me
up.
Où est gérée votre base de données ?
En interne.
Vous venez de lancer une nouvelle campagne de communication. Quelle en est la teneur ?
Jusqu'à présent, Banque Directe avait
exclusivement attaqué le marché par le produit le plus fidélisant : le
compte-courant. Cette fois-ci, nous attaquons avec un produit d'épargne
fortement rémunéré (à 5 %). Nous pouvons le faire maintenant car nous sommes
plus connus en raison de notre appartenance au groupe BNP Paribas, et puis,
nous disposons d'une palette d'offres beaucoup plus large. Banque Directe a
maintenant plus de six ans d'expérience derrière elle. Notre nouvelle campagne
est plus une campagne produits qu'une campagne de notoriété, car la notoriété,
nous l'avons acquise. Elle se décline sur les chaînes généralistes (TF1, France
2, France 3, Canal+, M6) ainsi que sur LCI, Eurosport, et i-Télévision ; notre
Numéro Azur figurant sur chaque spot télévisé. La campagne se déroule également
en presse et sur Internet. L'agence de publicité, qui a conçu la campagne
presse et télévision, est Ogilvy & Mather. Nous n'y mettons pas spécialement en
avant le site web, car nous sommes déjà considérés comme une banque internet.
Dans l'esprit du grand public, c'est naturel, donc nous pouvons nous affranchir
de communiquer dessus.
Comment vous situez-vous dans l'univers bancaire aujourd'hui ?
Dans le domaine de la bourse en ligne,
Banque Directe figure dans les dix premiers. Dans l'univers de la banque à
distance proprement dit, nous sommes les premiers puisque nous sommes les
seuls. C'est pourquoi, nous attendons avec impatience l'arrivée de Zebank, le
projet de banque en ligne de Bernard Arnaud, celui des AGF, I-Banque, et le
projet belge Fortis Banque. Cela dit, les retards pris dans les projets
démontrent que l'on ne peut pas construire une banque à distance en quelques
mois... Nous avons envie d'entrer en compétition, donc il faut que ces projets
sortent et qu'ils sortent bien. Sinon, cela risque de donner une mauvaise image
du métier. Il y a de la place pour plus d'un acteur dans ce domaine. Mais, pour
l'instant, nos concurrents restent les banques traditionnelles.
Que tirez-vous de votre appartenance au groupe BNP Paribas ?
La
signature BNP Paribas est vécue comme un plus par nos clients. Et le groupe a
décidé d'investir lourdement dans Banque Directe. Nous avons, par ailleurs, des
liens avec d'autres sociétés du groupe. Cortal, par exemple, assure depuis le
mois de juillet dernier la gestion des comptes en bourse de nos clients, ce qui
était fait jusqu'alors par le Crédit du Nord.
Vos projets pour 2001 ?
Le pied sur l'accélérateur ! C'est-à-dire plus de moyens, plus
de communication, plus de produits.
Biographie
Agé de 35 ans, maîtrise de finances à Dauphine, Marc Lanvin a rejoint Banque Directe en mai 1995, en tant qu'adjoint au directeur d'exploitation, puis a été nommé directeur de l'organisation et de la qualité. En mars 1999, il a pris la direction du département Internet et multimédia, depuis juin 2000, il occupe la fonction de directeur Internet et marketing direct, à la suite de la fusion des deux services.
L'entreprise
Actionnariat : BNP Paribas à 100 %. Au 30 juin 2000 : Encours gérés : plus de 2,8 milliards de francs. 100 000 comptes dont 54 000 comptes-courants et plus de 20 500 comptes-titres. 75 500 clients. Contacts Web clients mensuels : 200 000. Taux de fidélisation : 94 %. Banque Directe a atteint son poids mort de gestion, désormais tout nouveau client rapporte de l'argent. Investissements prévus par BNP Paribas : 850 MF. Effectif : 200 personnes. Directeur général depuis mai 2000 : Jean-Bernard Lafonta. Objectifs à fin 2002 : 300 000 comptes, 200 000 clients, 15 MdF d'encours gérés.