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[Tribune libre] "Le travail dominical, une interdiction en rupture avec son temps"

Publié par Rodolphe Bonnasse, DG de CA Com et spécialiste de la grande distribution le | Mis à jour le

Lointainement ancrée dans la culture chrétienne, la France et ses voisins ont longtemps sacralisé le dernier jour de la semaine, celui lors duquel Dieu lui-même est resté au repos. Mais cette tradition a-t-elle encore sa place dans une époque ou le commerce se dématérialise et s'internationalise ?

Aujourd'hui, la concurrence est mondiale. Certes, ce n'est pas vrai pour tous les secteurs. Cependant, pour des univers commerciaux tels que les produits de luxe, le tourisme... les vrais concurrents sont à chercher à l'étranger. Le cas des grands magasins illustre idéalement ce phénomène : prenez par exemple un touriste Coréen, pensez-vous qu'en préparant son voyage il hésite encore entre Le Printemps et Les Galeries Lafayette ? Malheureusement non, désormais il hésite plutôt entre les grands magasins de Paris et ceux de New-York, Moscou, Tokyo...etc. Et ce qui différencie ces destinations, ce sont les longues plages d'ouvertures de leurs magasins.

De plus, les usages des français changent : ils dépensent toujours plus de temps en déplacement entre leur lieu detravail et leur domicile, leur consommation se décloisonne progressivement et ne respecte plus du tout le modèle des générations précédentes (qui consistait généralement à faire un plein de courses le samedi, pour toute la semaine). Désormais, on pourrait presque dire que la consommation et les actes d'achats se font quotidiens, voire pluri-hebdomadaires. Les consommateurs passent rapidement par leur enseigne préférée en sortant de leur journée de travail et n'hésitent pas à y retourner dès le lendemain.

De plus en plus de familles sont constituées par des couples d'actifs qui n'ont pas d'autre solution que de se rendre en magasin le soir. C'est finalement un choix extrêmement pragmatique de la part des enseignes de proposer ces horaires élargis. A ce titre, les fermetures annoncées forceront les consommateurs à se réadapter à une nouvelle organisation horaire, moins flexible, moins facilitante.

Les principales victimes de ces fermetures, outre les enseignes et marques, et les consommateurs, seront avant tout les salariés. Car rappelons que ces temps de travail n'étaient en aucun cas imposés mais bel et bien " proposés " aux salariés des enseignes concernées. Nous pouvons citer les enseignes de bricolage et d'équipement de la maison, comme Leroy Merlin, Bricorama, ou encore Castorama, mais aussi les récentes difficultés de Sephora, de Monoprix et de l'ensemble des magasins de l'avenue des Champs Élysées (dont les ventes d'après 20h représentent environ 20% du chiffre d'affaires global des commerces de l'avenue).

Je dénonce une certaine stigmatisation du commerce, en tous cas une bien basse considération de l'activité commerciale dans son ensemble... Notre époque semble oublier que c'est sur l'attractivité commerciale que se sont construits les villes, les régions, les pays, les peuples que nous formons aujourd'hui.

Ainsi c'est un véritable débat qu'il faut mener, une vraie réflexion autour de notre rapport au temps et au travail. Le commerce n'est pas une tare mais une condition de notre épanouissement social. Et si mon point de vue était sollicité, je proposerais de le renforcer au lieu de l'affaiblir.

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