Thierry Jadot (Dentsu Aegis) prône la responsabilisation des médias
Publié par Mégane Gensous le - mis à jour à
Invité d'un petit-déjeuner de l'Association des Journalistes Médias, Thierry Jadot, président de Dentsu Aegis Network France, s'est prononcé en faveur d'un assouplissement de la réglementation publicitaire au profit d'une auto-réglementation de la profession.
Encadrement de l'achat d'espace sur le digital par le décret de la Loi Sapin il y a 4 mois, interdiction de la publicité autour des programmes jeunesse sur France Télévisions il y a 6 mois... Pour Thierry Jadot, président de Dentsu Aegis Network France invité à partager à sa vision des relations entre médias et publicité par l'Association des Journalistes Médias ce 15 juin, "la France est le pays le plus réglementé au monde en matière de publicité". Un zèle législatif qui serait pour lui en partie responsable de la stagnation du marché publicitaire, dont la croissance est estimée à 0,5% pour 2017 par l'IREP, France Pub et Kantar Media. Cette situation semble inéluctable pour les médias français, qui traversent "non pas une crise, mais une transformation" nécessaire face à des acteurs comme Google et Facebook, qui ont inventé de nouveaux modèles qui leur assurent aujourd'hui une position hégémonique sur le marché. Pour y remédier, Thierry Jadot préconise, en plus d'un assouplissement de la législation ("en modifiant par exemple la réglementation obsolète pour ouvrir la publicité à d'autres secteurs comme le cinéma"), une responsabilisation du marché.
Engagement citoyen des médias
Si les relations avec les GAFA sont souvent houleuses, comme observé lors de la présentation du dernier Observatoire de l'e-publicité qui a vu le marché vend debout comme leur duopole, le président de Dentsu Aegis estime que "les relations se sont apaisées avec ceux qui sont à la fois nos partenaires et nos concurrents, depuis que les plateformes sociales ont décidé de devenir des médias" de l'aveu de Mark Zuckerberg lui-même fin 2016. Selon lui, l'heure serait à présent à la responsabilité des plateformes, "souvent poussées par les pouvoirs publics" voire par les annonceurs eux-mêmes, à l'instar de la vague de protestation contre Youtube en Grande-Bretagne en avril dernier face à l'impossibilité de garantir la brand safety. Facebook a ainsi annoncé début 2017 avoir adhéré au Centre d'étude des supports de publicité (CESP), quand dans le même temps ce dernier rejoignait le "Measurement Council" du réseau social.
En parallèle, "les agences média doivent également avoir un rôle citoyen" considère celui qui a rejoint le groupe de communication en 2012. Par exemple, "en n'injectant pas d'investissements publicitaires dans des médias qui ne partagent pas nos valeurs et celles de nos clients". C'est pour cette raison que son agence média Carat a fait le choix de geler les investissements de ses 300 annonceurs autour du programme Touche Pas à Mon Poste suite à "une séquence objectivement homophobe"... tout en ne considérant pas cette décision comme une sanction envers C8 dont l'agence attend "des engagements forts". L'engagement citoyen des médias doit aussi se matérialiser par "une offre média la plus pluraliste possible" : si Thierry Jadot ne voit pas d'objection au rapprochement entre Vivendi et Havas, il est cependant conscient que "le risque de conflit d'intérêt existe, au marché d'être vigilent pour qu'il n'ai pas lieu".