« En 2015, l'e-pub représentera 4,2 milliards d'euros en France »
Publié par Damien Grosset le - mis à jour à
La donne change dans l'e-publicité avec la multiplication des formats et l'apparition de nouveaux acteurs. En exclusivité pour e-marketing, Alexia Dassi, chef de projets Xerfi-Precepta, revient en détail sur la dernière étude du groupe : “Le marché de l'e-publicité à l'horizon 2015”.
Le taux de croissance des dépenses publicitaires a fortement baissé ces dix dernières années. Cette tendance va-t-elle se poursuivre d'ici à 2015 ?
Le marché publicitaire ne se portera pas mieux d’ici à 2015 en raison de la mauvaise conjoncture économique et de puissants freins structurels comme le déséquilibre croissant de l’offre et de la demande d’espaces publicitaires, la déflation des prix de ces espaces, ou encore l'intensification des rivalités concurrentielles. Au final, l’effort publicitaire s’enlise depuis 2001 ! La publicité est devenue une commodité et joue le rôle de variable d’ajustement à la conjoncture. Nos prévisions tablent d’ailleurs sur une quasi-stagnation du marché publicitaire en 2012 (+0,5 %), suivie d’une hausse annuelle moyenne de 1,7 % sur la période 2013-2015 pour s’établir à près de 33 milliards d’euros.
La publicité en ligne fait figure d’îlot de croissance durable. D’abord, la fascination des individus pour la technologie n’est en effet pas prête de faiblir, comme en témoigne la hausse des équipements “connectables” à Internet au sein des foyers français. Ensuite, de nouveaux usages (délinéarisation, individualisation…) renouvellent et intensifient la consommation de médias on line. Une consommation croissante, et surtout choisie. Enfin, les opérateurs multiplient les efforts d’innovation et de création de valeur publicitaire pour proposer des formats impactants et moins intrusifs. Nous tablons sur un taux de croissance annuel moyen de la publicité en ligne en France de 7,4 % entre 2011 et 2015. À l’horizon 2015, le marché français de l’e-pub représentera ainsi 4,2 milliards d’euros.
Pourquoi la donne est-elle en train de changer dans l’e-publicité (multiplication des formats, apparition de nouveaux entrants,…) ?
Qui dit nouveaux usages, nouveaux supports et nouveaux outils, dit forcément redistribution des cartes. Le dynamisme du secteur attise les convoitises des régies traditionnelles, des pure players, mais aussi d’acteurs dont le cœur de métier historique est parfois loin du monde de la publicité et des médias, à l'instar des fournisseurs de logiciels. En quête de la publicité “parfaite”, les régies sont donc confrontées à la transfiguration de leur métier, à la reconfiguration de leur chaîne de valeur (la maîtrise technologique devient un maillon essentiel) et à la complexité croissante du jeu concurrentiel (nouveaux modes d’organisation dans la filière, par exemple avec l’essor des ad exchanges…).
Entre des annonceurs obnubilés par le retour sur investissement et des internautes de plus en plus exigeants, comment les régies peuvent-elles se sortir d’affaire ?
Les régies doivent concilier des attentes a priori contradictoires des annonceurs, des éditeurs et des internautes. Ce qui est une véritable gageure pour la plupart des régies. Mais pour prouver leur performance et leur capacité à délivrer “la bonne publicité, au bon endroit, au bon moment, à la bonne personne”, la technologie apparaît comme le remède miracle pour les régies. Les business models de Google Adwords ou encore de celui du Français Criteo sont dans cette optique riches d’enseignements. Dans les deux cas, la technologie permet de délivrer une publicité hyper-ciblée, dans le cadre d’un modèle à la performance (rémunération au CPC, maîtrise du budget via un système d’enchères, logique de self-service…). Dans les deux cas, les annonceurs sont séduits par un discours de la preuve et une prise de risque maîtrisée.
Dans votre étude, vous annoncez que l’attention des régies se polarise sur quatre leviers de croissance. Quels sont-ils ?
Nous avons étudié 10 segments de l’e-publicité. Parmi ces segments, nous avons identifié quatre segments “émergents” prometteurs pour les régies digitales à la recherche de relais de croissance. Le segment des réseaux sociaux affichera une croissance annuelle moyenne de 36 % entre 2011 et 2015 pour représenter un peu plus de 300 millions d’euros de dépenses publicitaires. Grâce à la multiplication des espaces vidéo premium (web TV privées, télévision de rattrapage…) et au transfert d’une partie des annonceurs traditionnels en TV, le segment de la publicité vidéo représentera une manne potentielle de près de 160 millions d’euros en 2015. En plein boom, le marketing mobile, hors search mobile et création d’applications, devrait peser 85 millions d’euros d’ici trois ans (contre 37 millions d’euros en 2011). Enfin, celui du couponing devrait atteindre 32 millions d’euros en 2015.
Les annonceurs doivent-ils eux aussi modifier leur approche ?
Les annonceurs doivent apprendre à communiquer autrement et changer la nature de leur discours face à des consommateurs plus critiques vis-à-vis des marques et des médias (alors qu’ils font davantage confiance à leurs pairs). Pour capter l’attention de leurs cibles “any where, any time, any device”, les annonceurs doivent notamment être capables de proposer du contenu intéressant et engageant, constamment renouvelé et enrichi, à travers tous les supports connectés (PC fixe / mobile, smartphone, tablette, TV connectée, et bientôt voiture et autres objets connectés). Mais cette démarche, qui vise à instaurer un dialogue avec les consommateurs (logique du brand content), reste un projet d’entreprise complexe.
Pour en savoir plus, consultez l'étude “Le marché de l'e-publicité à l'horizon 2015”