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Pierre Calmard: "La renaissance doit tous nous guider collectivement"

Publié par La rédaction le - mis à jour à

Selon Pierre Calmard, DG du Pôle média de Dentsu France, et membre de l'Udecam, la renaissance doit, en cette période de crise sanitaire, tous nous guider collectivement. Les annonceurs doivent continuer à communiquer et les agences médias à les guider.

Les agences média ont l'habitude de traverser les crises. Notre génération a dû affronter la Loi Sapin de 1993, l'e-crack de 2001, la crise économique de 2008. Les métiers ont changé, se sont adaptés à la formidable complexification des écosystèmes de communication. La digitalisation nous a poussés à muter, l'évolution des besoins des annonceurs nous questionne tous les jours. L'adaptation rapide constitue notre quotidien.

Pourtant, nous vivons des bouleversements inédits. Pour la première fois dans l'Histoire moderne, l'économie mondiale s'est mise au ralenti, pour un temps encore indéterminé au moment où j'écris ces lignes. Il y a fort à parier que la récession nous guette. Chacun est inquiet pour sa santé, celle de ses proches ; pour son métier, sa capacité de rebond ; pour son environnement, et le destin de la planète que nous partageons.

Pour nos clients, pour les médias, comme pour nous-mêmes, les incidences sont encore inconnues, mais l'avenir s'est subitement assombri.

Pourtant, dans le redoux de ce printemps qui s'annonce, il est utile de poser un regard optimiste sur nos devenirs. "Nous sommes en guerre", certes - mais ce combat est d'une toute autre nature que les conflits qui déchirent les Hommes. Nous sommes en guerre contre un virus, et à ce titre, l'humanité partage un seul et même bateau. La nuance est fondamentale.

Sénèque insiste sur ce paradoxe: la maladie a pour vertu de réveiller l'existence. Et si, dans ce maelstrom de confinement et d'angoisse sourde, se dessinait la possibilité de bienheureuses ruptures ?

Opportunité pour les agences

Pour les agences, dont les résultats économiques sont mis à mal depuis plusieurs années, la crise actuelle peut constituer une opportunité, voire une chance.

Nous démontrons déjà collectivement une capacité de réaction rassurante. Nous avons adapté en un temps record nos organisations à un télétravail généralisé, à embarquer nos équipes dans des formes d'organisation souples et agiles, à servir les annonceurs sans rupture. Nous conseillons nos clients sur les stratégies à adopter dans ce contexte inattendu, reportant des campagnes, adaptant les leviers et les messages, reformatant les approches. Nous gérons, mais nous gardons le regard braqué sur l'avenir.

Car ce qui compte, c'est l'après. Quelle que soit l'ampleur de la crise, nous en sortirons un jour. Les marques ont leur rôle à jouer - et elles ont déjà pour la plupart déjà agi pour le bien commun, avec célérité et pertinence.

La renaissance, c'est ce qui doit tous nous guider collectivement. A l'heure de la reprise, seront gagnantes les marques qui n'auront pas oublié de communiquer, tout en ayant réussi à adapter leurs messages. Le silence n'est pas toujours d'or, il peut être coupable. Être présent dans les moments difficiles, dans le quotidien des Français, fut-il meurtri, marque une occasion de démontrer ce que les consommateurs recherchent désormais avant tout: le respect. Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour.

La renaissance, c'est ce que nous devons préserver. Les médias, dont l'économie est déjà complexe, vont souffrir de la crise. Leur pluralité constitue pourtant le socle de la démocratie. Les annonceurs doivent s'en souvenir, et anticiper. Le jour d'après, la pire situation serait de se retrouver collectivement prisonniers d'un petit nombre de plateformes ou de médias globalisés, dans un oligopole de pensée qui risque de déteindre très vite sur un cartel de solutions dictant formats, tarifs et conditions d'accès aux consommateurs.

Les agences sont à leurs côtés pour gérer cette période difficile. Nous portons le fardeau d'un passé qui confine au mythe, le péché originel d'un manque de transparence qui appartient à l'Histoire. Mais tout a changé ; il est temps de l'affirmer, et de s'en rendre compte. Nos métiers souffraient déjà avant la crise, le risque est grand de les voir à nouveau mis à mal. Or, jamais l'art de la communication n'a été aussi délicat et déterminant, jamais l'écosystème médiatique et digital n'a été aussi complexe. Nos équipes savent les décrypter. Mieux certainement que des cabinets de Consulting certes d'un excellent niveau académique, mais peu aguerris à la mise en oeuvre que nécessitent nos métiers : la maitrise de la théorie n'est pas forcément le gage de l'excellence opérationnelle.

Le monde va sans doute changer, à nouveau. Je forme le voeu que le formidable métier que nous portons, ce métier qui permet d'orchestrer l'alchimie de la communication à travers les médias, retrouve son lustre d'antan.

Notre renaissance va consister à donner aux annonceurs les raisons d'y croire, objectivement, sans réserve, et en pleine collaboration.

L'auteur

Pierre Calmard est DG de Dentsu France, Pôle Média. Il est membre du conseil d'administration de l'Udecam.

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