Quels résultats pour la bière Bud en France ?
Publié par Clément Fages le - mis à jour à
C'est l'un des lancements phare de 2019 : l'américain Budweiser, leader mondial, est arrivé dans l'Hexagone avec sa célèbre Bud et l'ambition de redynamiser le marché français des lagers en atteignant les 10% de parts de marché d'ici à 3 ans. Et ses premiers résultats ont de quoi le faire mousser !
Marque iconique américaine, les spots de Budweiser ont fait les beaux jours du Superbowl et marqué les grandes années de Culture Pub. En France, son taux de notoriété était ainsi en début d'année de 62%, ce qui n'a pas été pour autant synonyme de sinécure pour la marque, au moment de s'implanter dans un marché hexagonal aussi complexe qu'encadré. Présentée comme " le plus gros lancement du marché depuis dix ans ", l'arrivée en 2019 de " Bud " en France - la marque n'a pas les droits sur Budweiser qui appartient à un brasseur tchèque - peut être qualifiée de réussite. Et ce n'est pas Jacques Lebel, directeur marketing d'ABinBev en charge du lancement, qui nous contredira : " Selon Nielsen, nous avons pris 0,8 points de parts de marché en 2019. Sachant que nous étions quasiment absents des linéaires les trois premiers mois de l'année, cela revient à une part de marché comprise entre 1 et 1,5% ces cinq derniers mois, et jusqu'à 1,9% cet été, dans une période historiquement propice aux ventes de lager. Notre objectif désormais, c'est de passer au moins une fois la barre des 2% dans les prochains mois, et d'entrer dans le Top3 des marques de lager en France dans au moins 3 ans. "
Bud, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 19,9 millions d'euros sur les dix premiers mois de 2019, se présente ainsi comme un challenger sérieux pour le trio Heineken, 1664 et Kronenbourg, dans une catégorie des lagers en perte de vitesse : " Nous avons dépassé la barre du million de foyers acheteurs, et avons un taux de réachat de 40%. C'est une très belle performance dans un segment en fort déclin depuis dix ans, bien que le marché global de la bière en France soit sur une dynamique de croissance de +3% en volume, tiré notamment par les bières de spécialités (bières d'abbaye, bières craft ou bières aromatisées). Notre ambition est de relancer ce segment en France."
Bud est ainsi le premier annonceur média du secteur en 2019, avec 47% de part de voix sur les lagers, des investissements " deux fois supérieurs à ceux de nos deux plus gros concurrents réunis " selon Jacques Lebel. Il évoque 26 semaines de présence média depuis le mois de mars, de quoi permettre à la marque de toucher 94% de la population française, " avec une fréquence moyenne de 104 contacts ! À cela s'ajoute des partenariats avec des festivals ou des acteurs de la food delivery et un développement commercial soutenu en grande distribution et en CHR, alors qu'on découvre souvent une nouveauté par ce biais avant de la racheter en grande surface ", détaille le directeur marketing. Cela s'est traduit par de la mise en avant sur des plateformes comme Saveur bière (le site e-commerce d'AbinBev), ou Deliveroo, mais aussi sur les sites des distributeurs et lors d'événements sponsorisés ou organisés par la marque. Reste que dans son déploiement, la marque a dû faire de nombreux choix, et ajuster sa stratégie en cours de route.
Priorité aux moins de 35 ans
Au sein de son plan massif, la marque a ciblé en priorité les urbains de moins de 35 ans, afin de créer de l'affinité avec cette cible spécifique. De quoi mettre en évidence une première problématique : comment concilier ces deux stratégies ? " En France, il est difficile pour un alcoolier de devenir une marque affinitaire. Mais il faut toutefois travailler ce que j'appelle la " familiarité " de la marque, et éduquer le consommateur sur un marché Français où l'on ne fait par exemple pas très bien la différence entre une lager et une pale ale. Nous pensons que les moins de 35 ans seront prescripteurs sur l'ensemble du marché ", évoque le directeur marketing, prenant en exemple les stratégies des équipementiers sportifs.
Dans sa stratégie événementielle, la marque a ainsi priorisé quelques festivals centrés sur la culture urbaine (musique, danse, graphe, etc.), mais aussi des soirées organisées en propre, à l'image du BudLab, un bar éphémère ouvert à Paris cet hiver. De son côté, le plan média cherchait également à toucher cette cible : " En radio, nous avons été pendant 8 semaines sur des stations comme NRJ, Skyrock ou Fun Radio. Sur le digital, ce sont des partenaires comme Brut, Vice ou Konbini qui ont diffusé des sujets affinitaires. C'est ce que je recherche en tant qu'annonceur : une audience forte et des contenus éditorialisés et donc engageants. " Enfin, la gestion des réseaux sociaux, basée en France, se fait donc dans le cadre de la loi Evin : " Notre message est concentré sur le produit. Nous avons la chance d'avoir une histoire produit assez forte, puisque nous sommes la bière la plus douce, avec le moins d'amertume en bouche. C'est ce que nous mettons en avant dans nos stories. "
Une stratégie qui a porté ses fruits, puisque Jacques Lebel évoque un incrément de 47% sur les volumes de lager vendus en France directement rattachable à Bud : " Nous avons recruté sur la catégorie, mais également en dehors auprès de gens qui ne buvaient jamais de bière. La moyenne d'âge de nos consommateurs est bien plus jeune que celle de nos concurrents. Nous sommes 1,5 fois plus indexés qu'eux sur la cible des moins de 35 ans. Nous avons également plus de 70% de notoriété sur cette cible et 50% de considération, contre un peu moins de 70% et 40% au global'", explique le CMO, qui veut dépasser la barre des 75% de notoriété en 2020. Pour lui, ces 47% de ventes incrémentales sur la catégorie sont un argument de poids pour convaincre les distributeurs. " Nous sommes distribués par 91% des magasins, et nous étions déjà à 80% au bout de deux mois. C'est l'avantage d'être une marque comme Bud. Désormais, nous allons nous attaquer à la distribution de proximité. "
Reste à connaître les enseignements tirés par Jacques Lebel de ce lancement : " Au départ nous avons fait beaucoup d'affichage. Mais il fallait aussi travailler sa considération. Nous avons donc diversifié le mix, et nous avons vu les résultats décoller quand nous nous sommes affirmés cet été en radio et en digital. Aussi nous voulons construire en France une marque premium : nous sommes la plus chère des lagers, avec en moyenne un prix 10% plus élevé que celui de la concurrence. Ça ne nous a pas empêché de faire des campagnes promotionnelles pour avoir une forte visibilité en magasin. " Le groupe ABinBev a donc décidé de focaliser ses efforts sur Bud plutôt que sur des marques comme Leffe cette année, afin de rester dans les clous de la loi EGAlim. "Le taux de réachat de 40% montre que les gens adhèrent bien au " liquide ", comme on dit chez les brasseurs."