La qualité, le levier pour sortir de la guerre des prix
Publié par Maud Vincent le | Mis à jour le
Malgré une forte sensibilité au prix, les Français intègrent dans leurs décisions d'achat d'autres dimensions aussi importantes au premier rang desquels la qualité.
Le prix juste n'est pas le prix le plus bas. Et cette affirmation n'est pas celle des marques et enseignes mais bien la voix des consommateurs. L'Observatoire du rapport au prix (ObSoCo), ou bien encore KantarWorldPanel ont analysé en profondeur la perception et les pratiques des consommateurs. Battant en brèche l'idée reçue selon laquelle, plus qu'en toute autres circonstances, les Français rechercheraient avant tout le prix le plus bas en période de morosité économique et de pouvoir d'achat en berne, les rapports de ces deux instituts d'étude(1) montrent que si les consommateurs sont sensibles au prix, ils intègrent dans leur décision d'achat d'autres critères au moins aussi importants au premier rang desquels la qualité. 39% des personnes interrogées par l'ObSoCo estiment, en effet, que le prix juste est avant tout le prix qui assure le meilleur rapport qualité-prix. "Si le contexte du pouvoir d'achat renforce effectivement la sensibilité des consommateurs aux prix et induit des comportements d'achats malins, il semble que les consommateurs soient de plus en plus nombreux à considérer que le produit le moins cher n'est pas nécessairement une bonne affaire (...) Moins de 7% jugent que le prix juste est le prix le plus bas possible", résume l'étude de l'ObSoCo.
Conséquence des scandales alimentaires comme celui de la viande de cheval pour les surgelés Findus ou bien encore des pratiques d'obsolescence programmée en matière de produits technologiques et d'électroménager ? Toujours est-il que les consommateurs portent une forte attention à la qualité des produits. Selon l'ObSoCo, 90% déclarent porter une attention croissante à la qualité des produits qu'ils achètent dont 45% affirment faire beaucoup plus attention qu'il y a cinq ans.
C'est également le constat de KantarWorldPanel (cf. encadré ci-dessous) dans son étude portant sur les typologies de consommateur en matière alimentaire. Si 46% des foyers français considèrent le prix comme le critère de choix le plus important, ils sont plus nombreux (47,4%) à se déclarer prêts à payer plus cher pour des produits de qualité (+1 pt versus 2013). Un constat à mettre en parallèle de la baisse des parts de marché qu'accusent depuis deux ans les marques MDD et le secteur du hard discount.
Reste à préciser ce que recouvre la qualité, notion polymorphe et qui s'apprécie différemment selon les catégories de produit. Dans le secteur du non-alimentaire, les consommateurs plébiscitent la solidité et la durabilité des produits tandis que dans l'alimentaire, ces derniers concentrent leur attention sur le goût, mais aussi sur les garanties d'hygiène et de sécurité ainsi que sur l'origine géographique des produits. La notion de service est aussi clé : extension de garantie, dispositif de click&collect, mise en place de " drive "... Enfin, les considérations altruistes inscrivant l'échange marchand dans une dimension sociale ne sont pas à prendre à la légère. Citoyen, le consommateur l'est aussi dans l'assiette. L'ObSoCo relève ainsi que, pour 28% des interrogés, le prix juste est celui qui assure une rémunération satisfaisante aux salariés et qui permet d'assurer la protection de l'environnement.
(1) "L'Observatoire du rapport au prix, comment la perception de la justice des prix guide-t-elle le choix des consommateurs ?", octobre 2014, sous la direction de Philippe Moati. "Sortir de la guerre des prix par la connaissance client", KantarWorldPanel, décembre 2014.
"Les consommateurs se laissent séduire par d'autres arguments que le prix"
L'envie de se faire plaisir, le goût pour la nouveauté, mais aussi pour la praticité ou bien encore les préoccupations sociales et environnementales : une foule d'éléments rentrent en ligne de compte dans le prix que sont prêts à payer les consommateurs. Loin d'être le seul critère de choix, le prix ne joue pas nécessairement un rôle discriminant selon les catégories de population et de produit, révèle l'étude de KantarWorldPanel sur les typologies de consommateur en matière alimentaire. De fait, "Les Français ne recherchent pas uniquement les meilleurs prix. S'ils y sont sensibles, ils valorisent davantage la qualité", analyse Gaëlle Le Floch, strategic insight director. L'énorme succès des dosettes sur le marché du café, dont le coût à la tasse est beaucoup plus cher que celui moulu, est un bel exemple qui montre à quel point le prix ne fait pas tout.
La dimension citoyenne est importante même si celle-ci a changé de perspective : "Le centre de gravité s'est déplacé, de la planète à sa ville et sa région. On parle davantage de soutien aux producteurs locaux, de made in France, de lutte contre le gaspillage." Plutôt que de parler de prix bas, Intermarché a misé sur cette stratégie pour regagner des parts de marché avec sa campagne multi-primée sur "les fruits et légumes moches".