Inflation : Comment les marques et les consommateurs s'adaptent-ils ?
Publié par Matis Demazeau le - mis à jour à
Depuis près de deux ans, la hausse des prix généralisée dans l'Hexagone pousse les Français à modifier leurs habitudes de consommation, contraignant les marques à revoir leur copie.
Même si l'inflation en France connaît un ralentissement depuis plusieurs mois (4,3 % sur un an en juillet 2023 contre 6 % au début de l'année selon l'Insee), le portefeuille des Français continue de se rétrécir. Et la situation demeure préoccupante : un consommateur sur quatre envisagerait, pour faire face à ce contexte inflationniste, de moins dépenser pour l'alimentation. Conséquence, également, de l'inflation, les grandes marques sont de plus en plus boudées par les Français, au profit des produits de marque de distributeur (MDD). En effet, une étude menée par l'institut Circana révèle que les ventes de grandes marques ont chuté de 7,3 % depuis l'été dernier. Parallèlement, les marques de distributeurs attirent de plus en plus les consommateurs (+ 4,2 %). "Avec plus de 11 points de différentiel, la situation se durcit pour les marques nationales qui pâtissent en juillet tant du niveau élevé des prix que de la météo", analyse l'institut. En plus d'être vendues à un prix généralement plus bas, les MDD profiteraient d'une décélération plus importante de l'inflation en comparaison avec les marques nationales.
Baisses de prix, paniers anti-inflation...
Pour contenir la hausse des prix, les marques et les enseignes mettent en oeuvre différents plans d'action. Les baisses de prix ou la commercialisation de "paniers anti-inflation" en sont deux exemples. À titre d'illustration, la chaîne de grande distribution Carrefour multiplie les opérations marketing donnant accès à des produits plus abordables. Sa dernière campagne en date, du 20 août au 3 septembre, réalisée avec l'agence Publicis, met en avant sa marque distributeur, "Les Produits Carrefour", lancée en 1976, qui permet - "sans rogner sur la qualité" - de vendre des produits "30 % moins chers que ceux des grandes marques".
Dans la même veine, l'enseigne Auchan a imaginé, au début du mois de juillet, une campagne nationale offrant aux consommateurs des solutions "anti-inflation pro-plaisir" pour "acheter ce que l'on veut et pas ce que l'on peut". Casino, Intermarché ou encore Système U ont également opté pour ce type d'opération. Le marché du bio est également une victime collatérale de l'inflation. En effet, selon une autre étude récemment dévoilée par l'institut Circana, le chiffre d'affaires du secteur représente aujourd'hui moins de 4 % de celui de l'ensemble de la grande distribution. Pour surmonter cette période difficile, des enseignes comme Bio c' Bon et So.bio ont décidé d'annoncer des prix en baisse sur plus d'une centaine de produits de leurs rayons. Deux phénomènes rendent possible cette décision : la diminution du cours de certaines matières premières et la baisse des coûts de la logistique. Pour Pierres-Yves Fournet, directeur général des deux marques, il est important d'aider les Français à mettre davantage de produits bio dans leur assiette en les rendant plus abordables : "Nous avons choisi de répercuter aussi rapidement que possible à nos clients les prix en baisse. Nous agissons ainsi non seulement pour que les consommateurs qui font le choix d'une consommation Bio exigeante soient confortés dans leur choix, mais aussi pour continuer à recruter de nouveaux consommateurs. Nos deux enseignes proposent un modèle de consommation qui valorise les circuits courts et qui préserve la santé tout en répondant aux enjeux environnementaux actuels".
La "shrinkflation" : une stratégie au détriment des consommateurs
D'autres, à l'instar de Herta ou de McDonald's, adoptent une autre stratégie : baisser les quantités plutôt que les prix pour dissimuler la situation inflationniste. Dans le jargon du marketing, cette stratégie commerciale, au désavantage des consommateurs, s'intitule la "shrinkflation" ou la "réduflation". Une enquête de la Répression des fraudes menée au début de l'année montre que 11 % des commerces visités et 7 usines passées au crible sur 21 sont concernés par ce phénomène. McDonald's a, par exemple, été contraint de supprimer les tomates de ses burgers pour faire face à la hausse des prix. Bien que ne concernant - pour le moment - que les restaurants implantés en Inde, ce type de mesures pourrait également être appliqué dans l'Hexagone. En attendant, les prix exercés par le fast-food aux arches dorées continuent de grimper de manière exponentielle. Pour lutter contre cette "shrinkflation", la ministre déléguée chargée des PME, du commerce de l'artisanat et du tourisme Olivia Grégoire a décidé de saisir "dès la rentrée prochaine" le Conseil national de la consommation "pour qu'il établisse une enquête approfondie".