DMP : 3 ans après, quel bilan pour France Télévisions?
Publié par Floriane Salgues le - mis à jour à
Trois ans après le déploiement d'une Data Management Platform, France Télévisions fait le point sur les bénéfices de l'outil, et ses écueils, à l'occasion d'un événement organisé par Colombus Consulting et Oracle, le 7 juin.
Alors que le Data Management Platform bashing bat son plein depuis plusieurs mois, certains annonceurs croient encore au potentiel de cette plateforme de centralisation des données et de segmentation. Tel est le cas de France Télévisions, qui é galement conscient des failles de l'outil, a fait depuis 2015 le pari de la DMP, et ce, notamment, pour travailler l'extension d'audience et la création de valeur pour sa régie publicitaire. Le groupe audiovisuel témoigne de son expérience de trois ans, à l'occasion d'un événement organisé par le cabinet Colombus Consulting et l'éditeur Oracle, le 7 juin.
DMP, acte I
Épisode 1 : La genèse
Début du scénario Data Management Platform, en 2015. France Télévisions fait le choix de Krux, la solution DMP de Salesforce. "Quand nous avons opté pour un équipement DMP, nous étions conscients que nous disposions de beaucoup de data et, en particulier, de données comportementales à valoriser", explique Valentin Vivier, responsable de projets data au sein de France Télévisions. Le groupe ne partait pour autant pas de zéro : "La gestion de la donnée utilisateur était déjà un enjeu courant pour nous, poursuit Valentin Vivier. Nous possédions également déjà un référentiel client assez conséquent dans lequel nous agrégions de l'information issue de différentes bases de données." France Télévisions compte sur ses atouts numériques : u ne dizaine de sites et une quinzaine d'applications, mais aussi plusieurs "verticales" (sport, culture, par exemple) et, donc, des contenus segmentants donnant la possibilité de caractériser ses audiences.
Pourquoi une DMP ? "La régie publicitaire était en demande d'une solution pour diversifier ses offres, internaliser la connaissance autour de la segmentation, répondre aux attentes des annonceurs et être innovant sur le marché", précise le responsable de projets data au sein de France Télévisions.
Épisode 2 : Le choix de la solution
France Télévisions établit en 2015 plusieurs critères de choix d'une DMP. Des critères techniques, d'une part :"Il faut que la collecte soit possible sur le Web et sur le mobile, ce qui n'est pas toujours facile avec une DMP", détaille Valentin Vivier. Et des critères fonctionnels : possibilité de réaliser une segmentation avancée des audiences, en fonction de traits caractéristiques et d'une fréquence pour créer un engagement ; possibilité de créer des profils jumeaux pour étendre l'audience rapidement directement depuis la DMP ; la compatibilité avec l'univers des outils d'advertising technologiques (DSP, SSP, par exemple) ainsi que des fonctionnalités de Tag Management System.
Épisode 3 : Les premiers use cases
Les use cases pensés par la marque se répartissent alors en trois univers : publicitaire (publicité ciblée display et vidéo Web, puis mobile, et cookie synchronisée sur DSP et SSP), marketing (opérés à la direction numérique de France TV) et étude (de recoupement entre les différentes offres, suivi des encapsulages de script permis par Krux). "Nous faisons en sorte que de plus en plus d'éditeurs puissent bénéficier de nos use cases compilés dans un catalogue de service" , fait part Valentin Vivier.
Un des premiers cas d'usage mis en place par le marketing a été l'autopromotion ciblée, soit du "display sur nos sites pour renforcer le maillage inter-offres", explique Valentin Vivier. Alors qu'auparavant le groupe affiche la publicité en fonction de la place disponible sur son site et de l'inventaire, place désormais à la publicité ciblée. Une campagne pour les appétents Plus Belle La Vie a été créée, afin de cibler des profils qui consomment quotidiennement et sur une longue période de temps des contenus France TV mais qui ne sont pas encore abonnés à l'achat de contenu par unité Pluzz VAD (ex France.TV). Une campagne d'auto-promo avec un code a été diffusée pour un achat sur le premier épisode. Résultat : un taux de clic supérieur à quatre fois au taux des campagnes traditionnelles et la génération de 70 nouveaux acteurs. "Avec la DMP, les taux sont souvent largement supérieurs à nos campagnes classiques", remarque-t-il.
Épisode 4 : Le bilan
Selon Valentin Vivier : "La DMP, c'est bien, mais c'est encore mieux de la coupler avec le CRM, car sinon l'outil ne caractérise que nos cookies, que le comportemental, que les utilisateurs anonymes. Avec le couplage DMP-CRM, on injecte des données utilisateurs anonymisées aux données comportementales." Pour ce faire, France Télévisions mise sur l'onboarding des utilisateurs - matcher un utilisateur anonyme avec un utilisateur identifié. " Dès lors qu'un utilisateur est identifiable sur notre site - création de compte, connexion, ouverture de newsletters -, l'identité déclarée de l'utilisateur est connue et il est possible de l'associer à son identité digitale ou anonyme. Puis l'appairage permet d'associer l'ID DMP avec l'ID CRM", décrypte Valentin Vivier. 15 % des clients sont onboardés.
Dans la DMP, les données issues du CRM (civilité, tranche d'âge, département et région) sont injectées. Dans le CRM, les personnes et les profils sont enrichis d'informations comportementales (identifiant DMP - soit suites de chiffres et de lettres - associé aux segments auxquels ils appartiennent au jour J). Résultat : l'enrichissement et la personnalisation des emails et des push notifications.
DMP, acte II
Episode 1 : changement d'éditeur
2018 : l'heure est au changement de DMP, au moment du renouvellement du contrat. Les critères de sélection ont été revus à la hausse. Les nouveaux critères techniques : être capable de déployer la DMP via un TMS ; s'appuyer sur un outil capable de mettre à disposition les logs DMP (cookie, visite...) et bénéficier d'un accompagnement spécifique pour le set-up technique. Les nouveaux critères fonctionnels : gérer la taxonomie de manière fine ; avoir une fonctionnalité d'exclusion des segments ; avoir une vision cross-device de l'utilisateur ; connexion à l'écosystème third party data ; obtenir une estimation du reach en temps réel. La DMP Bluekai d'Oracle est choisie.
Épisode 2 : DMP ou CDP ?
Le couple DMP-CRM a fait évoluer les pratiques au sein de France Télévisions, ainsi que l'écosystème data. Ainsi au niveau du traitement des données, en plus du référentiel client unique et de la DMP, une brique "Core Tex" est venue s'ajouter au-dessus de la DMP afin de traiter les informations comportementales des utilisateurs identifiés. Ce "centre de la connaissance client" date de 2017. Un outil proche de la CDP ? "Je ne sais pas si nous avons une CDP, mais notre démarche, avec la combinaison des 3 briques - DMP, CRM, Core Tex - est proche", fait part Valentin Vivier.
Épisode 3 : le bilan
Après 3 ans d'utilisation et "une bonne courbe d'apprentissage", le responsable de projets data au sein de France Télévisions dresse le bilan : "Déployer une DMP n'est pas si dur que ça, si vous disposez des outils, des compétences, des process. Sinon c'est un vrai casse-tête. Je conseille d'avoir un TMS et une bonne gouvernance." L'outil possède des points forts : "La DMP fonctionne bien sur le Web et sur les applications mobiles, poursuit-il. Son fort potentiel se situe au niveau de l'extension d'audience. Nous nous sommes au début beaucoup appuyés sur cette extension d'audience et nous avons eu des résultats satisfaisants." Autre bénéfice : les données third party proposées par les DMP à injecter selon les besoins d'activation pour enrichir les segments de base. Et de rappeler : "La DMP devient vraiment puissante quand elle est couplée au CRM."
Tout n'est pour autant pas parfait dans la DMP et ses limites semblent vite atteintes, note le spécialiste data : "La DMP n'est pas une boîte à outils magique. Nous avons besoin de faire des calculs dans un nouvel environnement big data. Nous nous posons la question de faire nos propres modèles de look alike pour maîtriser les calculs que nous générons." En 2019, France Télévisions veut aller vers l'automatisation de la création de segments dans sa DMP.
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