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Comment les agences se réinventent pour séduire les annonceurs

Publié par Maud Vincent le - mis à jour à

Produire plus et mieux. Pour relever ce défi, les agences mettent en place de nouvelles organisations plus agiles et jouent la carte de l'intégration pour séduire les annonceurs.


Comment mettre en place une nouvelle organisation agile capable de concevoir et de produire du contenu pertinent et en volume? Publicis Conseil a pris le sujet à bras le corps en créant le Loft, un tiers-espace de travail collaboratif qui se présente comme une cellule de brand content dédié aux annonceurs. "Sous la forme de missions commandos d'une durée de quatre semaines maximum, le Loft a vocation à répondre rapidement aux problématiques de contenu de nos clients. C'est un nouveau mode de collaboration "always-on" entre les équipes agence et les clients", explique Patrick Lara, directeur général de Publicis Conseil.

Mixer les compétences

Pour casser les silos et gagner en agilité, l'agence a fait le choix d'être hors-les-murs et de mixer au maximum des compétences internes, mais aussi externes : "On construit des équipes ad hoc en rassemblant autour d'une même table des créatifs issus de l'agence et d'autres profils comme des YouTubers, des Snapers, des motion-designers, des journalistes." L'intégralité de l'équipe travaille sur un même sujet au même moment : l'idéation et la production sont pensés ensemble pour une plus grande rapidité d'exécution et une meilleure rationalisation des coûts. En parallèle, la collaboration en temps réel entre les équipes de l'agence et du client contribue à gagner en rapidité comme en pertinence. "Les annonceurs viennent beaucoup plus souvent dans le Loft qu'en agence. Au coeur du processus de création, il assure une prise de décision rapide." Des clients de l'agence comme Renault, BNP Paribas, L'Oréal et Nestlé ont déjà adopté ce dispositif. Orange et Rowenta devraient le tester bientôt. Avec un objectif : "Être en capacité de fabriquer des contenus rapidement, peu chers, et qui soient intelligents et en ligne avec la plateforme de marque de notre client. Chaque matin, on fournit un brief et en fin de journée, on livre", détaille Patrick Lara.

Le storytelling du parcours client

La fragmentation du parcours client et l'explosion des points de contact imposent au marché un changement de paradigme : "Si, avant, le média se situait en aval de la chaîne de valeur, il faut désormais penser le média avant le message. Je ne crois plus à la division entre agence média et agence de publicité", tranche Thomas Jamet, directeur général d'IPG Mediabrands. Pour être efficace, une campagne doit pouvoir adresser toutes les étapes du parcours client, de la sensibilité à la marque jusqu'à l'acte d'achat. Autrement dit, il faut penser média et création en même temps. Une révolution pour les agences médias qui, de centrales d'achat, se transforment en "business partner". Arrivé en février dernier au sein d'IPG Mediabrands, Thomas Jamet a ainsi réorganisé les équipes sous la forme d'un triptyque qui intègre le digital et la stratégie de marque à l'approche média : "À côté des enjeux business portés par un directeur commercial, on met au service de nos clients un architecte digital à même d'orchestrer les rebonds entre les points de contact et un stratège de la marque qui intègre planning stratégique, connaissance client et data car il faut partir de ce qui intéresse les audiences et non des messages de la marque pour créer de l'engagement", explicite ce dernier.

Le danger de la désintermédiation

Le sujet est brûlant : les directeurs marketings sont en effet submergés par la création de contenu numérique à produire, qu'il s'agisse de bannières publicitaires, d'affichage digital, de contenu destiné aux sites web et réseaux sociaux, comme le révélait Accenture dans une étude publiée en avril dernier "Content: The H20 of Marketing". Et la compétition entre les agences de publicité est d'envergure : les acteurs à vouloir tirer leur épingle du jeu de ce marché en forte croissance se multiplient. "Dans le contexte actuel où la publicité classique génère moins de revenus, le brand content offre des gains d'opportunité", analyse Thomas Jamet.

En ligne de mire, la menace de la désintermédiation pointe son nez. "Des régies de groupes médias ont acquis des pure-players du contenu digital pour offrir aux annonceurs des dispositifs de brand content sur mesure comme Golden Moustache pour M6", appuie le patron de l'agence média. Les agences digitales compte également tirer profit de leur ADN numérique pour apporter des solutions performantes de gestion et de production de contenu : "Par définition, le digital est natif chez nous : depuis le départ, nous sommes acculturés à l'agilité, à l'hybridation des profils, à l'intégration de la technologie", souligne Laurent Nuyen, directeur de création de Digitas LBI.

Concurrence tous azimuts

Les agences de data marketing sont également sur le pont, à l'instar d'Artefact qui est en train de monter un pôle création pour compléter son offre data-driven. "Aujourd'hui, les annonceurs sont confrontés à un paradoxe : plus matures sur leur data, ils disposent désormais de segments d'audience qualifiés mais n'ont pas le volume de contenu pour les exploiter", pointe Vincent Luciani, co-fondateur d'Artefact. A l'origine sur le créneau du conseil en stratégie data, l'agence élargit son expertise à la création : "De la détection d'insights conso à l'activation en passant par la construction de scénarii narratifs, on couvre toute la chaîne de valeur et on rationnalise la production de contenu", loue le patron d'Artefact. Pour produire vite et mieux, l'agence s'appuie à la fois sur la connaissance client et des méthodes de travail lean et itératives. A la clé : des coûts de production maîtrisés et des créations affinitaires. Et de citer le cas du programme de fidélisation de Danone : "La campagne display a généré plus de 40 contenus au lieu de huit sur la campagne précédente, et les coûts de production ont été réduits de 60%."


Pour couvrir l'ensemble de la chaîne de valeur du contenu, les grandes agences misent de leur côté sur l'acquisition. L'agence de publicité Publicis a racheté en septembre 2016 Relaxnews, une plateforme de contenus partenaire de l'Agence France Presse. De son côté, l'agence média IPG Mediabrands recherche également ce chaînon manquant. "Nous sommes à un moment charnière de notre développement et nous souhaitons nous construire une légitimité sur la production de contenu stricto sensu, ce qui passera probablement par le rachat d'une société dont c'est le savoir-faire", livre Thomas Jamet.

Côté annonceur, une réorganisation à la traîne

Reste aux annonceurs à jouer le jeu car du côté des clients, "la tendance à diviser pour mieux régner demeure", soulève le directeur général d'IPG Mediabrands. "La profusion des agences - médias, publicité, digitale, événementielle, design, etc - ne favorise pas l'agilité." Si les annonceurs exigent de leurs partenaires agences d'avoir une vision holistique et intégrée, beaucoup ont encore une organisation silotée avec d'un côté, une direction marketing et, de l'autre, une direction média et communication. "Les annonceurs n'ont pas une organisation qui va avec leur ambition", tranche Thomas Jamet.


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