Le Do Gooding vous fait du bien
Publié par Martine Ghnassia et Isabelle Grange, Ifop le | Mis à jour le
Avec ou sans campagnes traditionnelles de communication, des marques américaines s'engagent pour créer un monde meilleur, une bonne action après l'autre.
Recycler, c'est bien. Mais faire le bien, c'est mieux ! Telle pourrait être, en forçant un peu le trait, la devise du "Do Gooding" (faire le bien). Sans être, à proprement parler, une révolution marketing, puisque bon nombre d'entreprises américaines se sont déjà investies dans l'action sociale, le "Do Gooding" va encore plus loin et innove, car non seulement les marques accomplissent des actions généreuses, mais elles incitent leurs clients à en faire de même et défendent l'idée que tous les actes bienveillants, cumulés, engendreront de grands bonheurs. Qualifiées aux États-Unis de "purpose driven" (elles s'interrogent sur leur but, leur mission sur Terre), les marques adeptes du "Do Gooding" établissent un lien nouveau et très affectif avec leurs consommateurs. Elles suscitent ainsi une préférence qui booste leur image.
En se plaçant sur le terrain de la réflexion morale, elles sortent de leur rôle marchand, pour mieux y revenir plus tard. Les exemples décryptés ci-dessous montrent qu'il n'est pas nécessaire d'être une mégabrand pour être entendu. De petits acteurs, qui savent jouer avec les médias sociaux, peuvent émerger efficacement. À deux conditions : rester crédible et honnête, car tout opportunisme sera sanctionné par le consommateur. Et demeurer bien conscient que le terrain des bonnes actions peut être miné : Gap a ainsi vu ses affiches célébrant la diversité taguées de slogans racistes.
Un grand, en tête de file !
Avec la crise financière, le mouvement solidaire "Pay it forward", qui encourage les petits actes généreux et totalement désintéressés, compte de plus en plus d'adeptes dans le grand public.Plusieurs géants de la restauration rapide ont décidé de rejoindre le mouvement et d'inciter leurs consommateurs à effectuer ces gestes qui changent la vie de tout un chacun. Les drive-in de ces enseignes proposent à leurs clients d'offrir un repas ou encore un simple café à la personne qui les suit dans la file, puis de signaler leur bonne action sur les réseaux sociaux, via les pages des enseignes. Starbucks, avec sa campagne "Come together", a publié des" visuels illustrant le thème du partage, tandis que les autres enseignes ont bénéficié des retombées de leur engagement sur plusieurs réseaux sociaux.
Retour aux sources
Avec sa campagne d'image "Make love", sortie à l'occasion des fêtes de fin d'années 2013, Gap revient à l'une de ses idées sources : célébrer la diversité. La marque donne la parole à des personnalités exemplaires qui ont su répandre, par leurs actes, l'amour autour d'elles. Affichage et presse diffusent des portraits affectueux de célébrités, seules ou en couple. Et les médias sociaux délivrent des contenus donnant des preuves tangibles de leur démarche altruiste. Ainsi, Tony Bennett, célèbre chanteur de 87 ans, est le fondateur d'une école de musique à but non lucratif. L'actrice Connie Britton exprime, quant à elle, son amour de la famille après avoir vécu une procédure d'adoption difficile.
Un petit s'y met aussi
Bijoutier indépendant de Boston, E.B. Horn Jewelers a développé en décembre dernier une campagne de notoriété originale à but caritatif. Il a créé le buzz et renforcé sa traditionnelle promotion de bijoux de fin d'année en versant 10 dollars au Boston Children's Hospital League pour chaque photo d'un baiser publiée par des couples avec le hashtag #EBHolidayKiss sur Instagram, Twitter ou encore Facebook.
Bonne conduite
Toyota, avec sa plateforme web TeenDrive365, veut devenir la marque automobile qui formera les conducteurs de demain. Pour y parvenir, Toyota a créé une batterie de services destinés aux adolescents (les jeunes Américains conduisent dès 16 ans) et à leurs parents. Aux parents, Toyota fournit des outils ludo-éducatifs pour faciliter leur rôle de formateur. Les conférences TED sur les dangers du multitasking au volant sont un modèle en la matière. Aux ados, Toyota offre, entre autres, des récompenses via des concours de vidéos portant sur leurs comportements au volant et des cours de simulation de conduite sur des machines professionnelles. Pour favoriser l'engagement des parties, le contrat Toyota Mutual Driving Agreement est signé par les parents et leurs ados, enfin d'accord sur ce projet bienfaiteur.
Avancer masqué
En jouant la carte du caritatif, le grand fashion retailer Nordström a pu s'implanter à New York, tant convoitée. Nordström a ouvert incognito un magasin de taille réduite, Treasure & Bond, et s'est créé une place dans le coeur des influenceurs en reversant 100 % de ses bénéfices à plusieurs associations caritatives. Le magasin, ouvert en août 2011, a fermé ses portes au bout de 736 jours et après avoir versé 200 000 dollars au profit de The Association to Benefit Children.
Martine Ghnassia
et
Isabelle Grange
Ifop, business unit dédiée au management de l'innovation. Avec le concours de ses correspondants au États-Unis. Au sein de cette business unit, nos deux expertes scrutent les signaux faibles et conseillent les entreprises en matière d'innovation stratégique. Comme l'explique Stéphane Truchi, président du directoire de l'Ifop, " parallèlement aux réflexions menées sur l'intégration des données du big data, il nous a paru essentiel d'étudier sur le terrain, en France et à l'international, des initiatives marketing innovantes pour analyser et anticiper les tendances de demain".