4 clés juridiques pour réussir sa Marketplace
Les Marketplaces connaissent une croissance fulgurante, comme en attestent les derniers chiffres communiqués par la Fédération E-commerce et Vente à Distance (FEVAD).
Par Gérard HAAS, Paul BENELLI et Stéphane ASTIER
Découvrez les 4 clés juridiques pour réussir votre projet.
Les places de marché (ou Marketplace) connaissent une croissance fulgurante, comme en attestent les derniers chiffres communiqués par la Fédération E-commerce et Vente à Distance (FEVAD). La présence de IZBERG ou MIRAKL, éditeurs de solutions de créations de marketplace, parmi les start-up françaises les plus prometteuses, n’est à ce titre, pas surprenante.
Rappelons qu’une place de marché est un espace virtuel permettant de mettre en relation des vendeurs et des acheteurs potentiels pour effectuer des transactions de biens et/ou de services. Cette plateforme est gérée par un tiers de confiance – l’opérateur, ou l’éditeur –, en charge de fluidifier, superviser et sécuriser les interactions entre les acheteurs et les vendeurs.
En pratique, lorsqu’un internaute achète un produit via une marketplace, l’opérateur transmet la commande et les informations relatives à la livraison au vendeur partenaire. Ce dernier est alors en charge d’expédier le produit au consommateur final.
Le consommateur bénéficie en effet d’une large sélection tant de produits que de prix, et effectue ses achats dans un cadre sécurisé. Le vendeur, de son côté, gagne en visibilité et dispose d’un canal de distribution supplémentaire pour écouler ses stocks. Enfin, l’opérateur peut augmenter ses marges, élargir et diversifier son offre et mutualiser les coûts.
Néanmoins, si le modèle de la marketplace semble a priori être simple, il comporte de nombreuses problématiques juridiques qu’il est impératif d’anticiper en amont du lancement de l’opération.
Quelles sont les principales sources de risques juridiques induites par le lancement d’une marketplace ? Et surtout comment s’assurer d’une mise en conformité permettant une exploitation sereine ?
Avant toute chose, tout entrepreneur souhaitant développer une marketplace devra porter une attention toute particulière à l’architecture contractuelle de celle-ci.
A ce titre, il devra nécessairement prendre en compte les dispositions de la loi dite « Macron » du 6 Août 2015, qui est venue encadrer les obligations des éditeurs de marketplace.
Désormais, chaque éditeur de plateforme est tenu de délivrer une information loyale, claire et transparente à l’ensemble de ses utilisateurs. Il doit donc pour cela doter sa plateforme de Conditions Générales d’Utilisation (CGU). Les modalités de référencement et de classement des offres de produit ou de services devront y être détaillées, au même rang que l’ensemble des conditions d’utilisation du service proposé par la marketplace, ou que les informations relatives à l’identité de l’éditeur.
Par ailleurs, si la plateforme met en relation des consommateurs avec des professionnels, son éditeur sera tenu de fournir à l’ensemble de ses utilisateurs-vendeurs un espace leur permettant de remplir leurs obligations d’information du client final.
Concrètement, la marketplace devra être faite de telle manière à ce que le vendeur puisse communiquer ses Conditions Générales de Vente (CGV) et ses propres mentions légales. La boutique en ligne mise à sa disposition devra, elle, le mettre dans les meilleures dispositions pour fournir au consommateur l’ensemble des informations précontractuelles qui lui sont dues.
Ces obligations ne doivent pas être prises à la légère, puisque tout manquement peut entraîner des amendes pouvant aller jusqu’à 375 000 euros pour la société éditrice de la plateforme.
Enfin, tout éditeur de plateforme devra contractualiser ses relations avec l’ensemble des commerçants à qui il proposera de vendre leurs produits, par son intermédiaire, via la marketplace. Les conditions de la mise à disposition d’une « E-boutique », et la détermination des responsabilités de chacun des partenaires pourront ainsi être organisées au sein de Conditions Générales de Service (CGS).
La marketplace permet donc à un marchand de disposer d’un espace sur un marché ouvert, où il pourra proposer ses produits, et d’ainsi bénéficier d’une meilleure exposition, et d’un canal de distribution supplémentaire.
Lorsqu’un client, consommateur ou non, procède à l’acquisition d’un des produits ou services proposés par le marchand via la marketplace, il passe un ordre d’achat qui est relayé par l’opérateur jusqu’au marchand.
Le client paie alors sa commande, en faisant transiter son ordre de paiement par la marketplace.
La tentation est alors grande, pour tout éditeur de marketplace, d’encaisser ces sommes, et de les reverser ensuite au vendeur hébergé sur sa plateforme en y soustrayant sa commission.
Cependant tout éditeur de plateforme doit se garder d’un tel comportement puisqu’il est formellement interdit, pour toute plateforme, de procéder à l’encaissement de sommes d’argent pour le compte d’autrui. L’éditeur de plateforme doit ainsi s’en tenir à son rôle de simple prestataire technique.
A cet égard, l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) veille à ce que les opérateurs se mettent en conformité avec la législation issue de la Directive 2007/64/CE de Service de Paiement (DSP), qui interdit à des établissements non bancaires de procéder à l’encaissement pour le compte de tiers.
Aussi, et dans l’hypothèse où ils ne répondraient pas aux exemptions prévues par ce texte, les opérateurs doivent entamer des démarches auprès de l’ACPR afin d’obtenir le statut d’Etablissement de Paiement ou de Monnaie Electronique.
Cela étant, ce statut juridique est particulièrement lourd et nécessite de suivre une procédure d’agrément auprès de l’ACPR qui peut s’avérer excessivement coûteuse.
L’éditeur de marketplace devra donc, pour ne pas risquer d’être sanctionné par l’ACPR :
En tout état de cause, tout éditeur de plateforme devra rester particulièrement vigilant concernant le respect de la réglementation financière en la matière puisque la législation actuelle va être réformée dans les prochains mois, la « DSP2 » ayant été promulguée le 23 Décembre 2015 au JO de l’Union Européenne.
Cette nouvelle mouture de la directive initiale de 2007 devrait directement impacter les places de marché existantes, en modifiant le cadre de la réglementation financière actuellement en vigueur.
Conformément à l’article 3 de la loi dite « Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978, l’opérateur d’une place de marché est responsable de certains traitement de données à caractère personnel qu’il diligente.
A ce titre, il doit assurer la sécurité et la confidentialité des données des utilisateurs-vendeurs de la plateforme.
Il doit par ailleurs, en tant que « sous-traitant » des vendeurs de la plateforme, veiller à la sécurité et à la confidentialité des traitements de données mis en œuvre par les vendeurs de sa plateforme concernant les données de leurs clients.
Tout manquement à cette obligation pourra être sanctionné par la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL), ou par toute juridiction saisie d’une personne justifiant d’un intérêt à agir. Ce risque de sanction n’est d’ailleurs pas négligeable puisque de telles infractions sont punies sur le plan pénal (articles 226-16 et s. du Code Pénal) et devraient faire l’objet d’un renforcement dans les prochains mois, dans le cadre du nouveau règlement européen sur les données personnelles, qui devrait être publié début 2016 (voir article).
Enfin, tout éditeur de place de marché est désormais tenu à une obligation d’information toujours plus poussée, qui ne devrait que s’accentuer dans le cadre du projet de loi pour la République numérique.
Ainsi, au-delà de l’obligation pour lui de se doter de Conditions Générales d’Utilisation, l’éditeur d’une place de marché devra désormais, à partir de Juillet 2016:
Pour satisfaire à cette exigence, les éditeurs devraient pouvoir renvoyer leurs utilisateurs vers les éléments d’information mis à leur disposition par les autorités compétentes de l’Etat en mettant à leur disposition un lien électronique vers les sites des administrations permettant de se conformer, le cas échéant, à ces obligations.
Il est toutefois conseillé à tout éditeur de place de marché de se rapprocher d’un professionnel du droit compétent puisque le fait de ne pas pouvoir justifier du respect de ces trois obligations l’expose à une amende de 10.000 euros !
Le droit des marketplace est en pleine construction. En renforçant drastiquement les règles contraignantes applicables, le législateur cherche à garantir aux utilisateurs une plus grande transparence. Mais à quel prix ?
En effet, de part sa complexité, ses sources multiples, le droit des marketplace est aujourd’hui source d’insécurité juridique pour les exploitants de ce type de plateforme qui demeurent bien en peine de suivre la multiplication des réglementations.
C’est dans ce contexte que le Cabinet HAAS intervient auprès de ses clients : audit juridique de la plateforme, évaluation des points d’écarts et des risques d’exploitation, mesure de consolidation, élaboration du cadre contractuel, etc. autant de prestations participant non seulement à la sécurisation juridique de l’activité mais également au renforcement de la confiance des utilisateurs.
Pour tout renseignement complémentaire, ou demande de devis, n’hésitez pas à contacter le Cabinet HAAS avocats.