«Monde réel, mondes perçus...», nouvelle étude de 366
Publié par MARIE JULIETTE LEVIN le | Mis à jour le
C'est à l'occasion du 31e Colloque NPA le 27 novembre que la régie 366 a présenté la nouvelle édition de son étude sociologique de référence « Françaises, Français, etc. » réalisée par le cabinet de conseil George(s). Des pistes de réflexion émergent pour les annonceurs afin de les aider à mieux comprendre leurs cibles.
Alors qu'en 2022, l'étude révélait la capacité des Français à s'adapter face aux polycrises, cette année l'enjeu est peut-être de contourner une réalité trop anxiogène pour adapter le réel à soi et écrire chacun sa propre histoire. « Les Français se représentent la France de façons très diverses, souvent antagonistes, comme s'il existait plusieurs France, qu'ils habitaient dans des pays différents... Comme dans des miroirs déformants, les représentations qui peuplent l'imaginaire des Français disent, quoi qu'il arrive, une vérité : la leur ! », a introduit Bruno Ricard, DGA marketing, communication et Études 366. Intitulée « Monde réel, mondes perçus... », cette septième édition révèle comment les Français, après s'être beaucoup adaptés aux crises successives de ces dernières années (Covid, Energie, Inflation...) tentent aujourd'hui d'adapter le réel à leurs envies et leurs visions. Les « mondes perçus » parfois très différents de ce que la réalité statistique nationale propose s'opposent ainsi souvent au « monde réel » qui fait de moins en moins consensus. On voit notamment apparaître le concept de « réalités parallèles » ou « réels particuliers » qui caractérisent non seulement une individualisation croissante de la société Française, mais aussi, de façon nouvelle, une conflictualisation grandissante des opinions, une déréalisation de certaines visions du monde et un développement grandissant de la défiance à l'égard des institutions qui communiquent : État, élus et médias nationaux, annonceurs, etc...
A chacun son storytelling
Dominique Levy-Saragossi et Edouard Lecerf, co-fondateurs de George(s) ont brossé le portrait d'une France multiple. « Ce qui est nouveau, ce n'est pas que nous soyons divisés, fragmentés, c'est ce sur quoi nous divergeons désormais : le réel lui-même et la façon dont, tout à la fois, nous l'appréhendons et nous nous le représentons ». Chacun est tenté d'écrire sa propre histoire pour « retrouver de la visibilité, la maîtrise dans un monde qui nous échappe », décrit Dominique Levy-Saragossi. Globalement, les sociologues mettent en lumière un marqueur fort : « la sensation d'effort demeure, la promesse de confort s'éloigne ».
Boussole pour les annonceurs
« L'enjeu majeur pour les annonceurs, c'est le déplacement du statut de la vérité qui les oblige à trouver les leviers permettant d'être perçus comme crédibles ou au moins sincères dans leur discours de marque », argumente Bruno Ricard
Et demain ?
Dans ce contexte instable, les contre-récits fleurissent à la fois individuels, communautaires, identitaires, nostalgiques, alternatifs. Alors, comment « faire réel commun », s'interroge les deux auteurs. « Nous nous fions à notre ressenti, qui devient une mesure de la réalité, notre réalité. Le chiffre de l'inflation en 2023 est de 4,9 %, mais « je vois bien, moi, que les prix ont doublé ». Ce décalage nourrit la défiance, la croyance en un dysfonctionnement. Alors je crois ce que je vois, à court-terme et près de chez moi, indique l'étude sociologique. « Comment pouvons-nous avancer, échanger, communiquer, faire société dans ce contexte ? » et « Où pouvons-nous renouer le dialogue ? ». L'étude explore quelques pistes... Développer les forces de conciliation et de concertation, mettre en place des stratégies individuelles rassurantes, s'ancrer dans un imaginaire... « Pour rebâtir la confiance, il convient d'allier raisons d'être et manières d'agir », précise Edouard Lecerf. L'étude montre qu'il reste des objectifs communs ou partagés, et en premier lieu celui « de kiffer », de se poser, d'être chez soi pour nourrir le besoin de réassurance, la demande de sécurité, le besoin d'un récit cohérent, le besoin de reconnaissance et de la dignité. Dans un contexte où « l'autre n'est pas un ennemi », le local apparaît comme un échelon essentiel. Pour créer un nouveau corps social, « nous sommes absolument condamnés à agir de façon cohérente avec exemplarité, volontarisme, avec considération et avec empathie », conclut Edouard Lecerf.
Méthodologie :
-Cabinet George(s) pour la conception, le planning stratégique et l'ethnographie digitale
-Aday pour l'analyse de big data sémantique (30 millions d'articles analysés)
-Kantar Insights pour l'étude quantitative (plus de 3000 interviews)