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[Tribune] FOOH : Quand le digital remodèle notre rapport à la réalité

Publié par Mathieu Vicard, DG d'Adrénaline, membre de l'AACC le - mis à jour à

Il y a tout juste un an, les Londoniens poussaient des exclamations enthousiastes devant Big Ben emmitouflée dans une parka The North Face. La vidéo était tellement crédible que de nombreux internautes se sont demandés si c'était vrai. Et le buzz a été énorme pour cet exemple emblématique de FOOH (Fake Out-Of-Home), les nouvelles publicités virtuelles en plein air.

D'autres campagnes FOOH ont marqué les esprits ces 18 derniers mois, telles la Barbie géante arpentant les rues de Dubaï à l'occasion de la sortie du film, la transformation de la tour Montparnasse en PS5 à Paris ou encore, à New York, une paire de lunettes Rayban qui s'envole de l'enseigne du magasin pour atterrir sur le nez du spectateur.

Tendance publicitaire du moment, le FOOH est aussi un symbole spectaculaire de la façon dont le digital s'immisce dans notre quotidien et redéfinit notre perception de la réalité. Dans un monde où les frontières entre le tangible et l'immatériel s'effacent, cette évolution transforme nos repères, nos comportements, et même nos valeurs.

Pendant longtemps, la localisation géographique était un facteur déterminant. Pour réussir, un restaurant devait être bien placé, une boutique devait soigner sa vitrine, et une agence immobilière devait attirer les passants avec des annonces en façade. Aujourd'hui, ces repères physiques sont remis en cause. Grâce au digital, un restaurant caché peut prospérer grâce à de bons avis sur TripAdvisor, une boutique sans adresse peut séduire avec Google Business, et un agent immobilier peut conclure des ventes sans jamais afficher une seule annonce dans une rue.

Le FOOH illustre parfaitement cette dynamique. Ces vidéos immersives en réalité augmentée, enrichies d'effets spéciaux et d'images générées par ordinateur intégrées dans un environnement urbain souvent remarquable remplacent l'enseigne traditionnelle. Le réel devient une toile sur laquelle le digital superpose des couches d'illusions. Et ce qui était autrefois tangible se transforme en expérience, souvent temporaire, parfois spectaculaire, mais toujours empreinte de virtualité.

Cette dématérialisation n'est pas qu'une avancée technologique ou pratique. Elle redéfinit des concepts fondamentaux comme le lieu, la présence et même la confiance. En fait, ce basculement soulève une question majeure : dans cette réalité remodelée, qu'est-ce qui reste vrai ?

Il ne s'agit pas tant de faire croire que de faire vivre.

Pour les marques qui souhaitent s'en emparer, cette transformation du réel par le digital est une opportunité immense, mais aussi une responsabilité. Le FOOH peut être un formidable outil de storytelling, capable de captiver et de marquer les esprits. Mais il impose une vigilance constante : ne pas céder à la tentation de la tromperie, au risque d'une perte de confiance dommageable entre la marque et les consommateurs. Créer des expériences mémorables, oui. Tromper pour impressionner, non, et d'autant plus à l'heure où les fake news se multiplient et où chacun est en quête d'authenticité.

Nous sommes en train de bâtir un futur où le réel et le digital s'entrelacent pour réinventer nos interactions. À nous de le faire avec responsabilité, transparence, et créativité - bref, en engageant le meilleur de l'esprit humain !

L'auteur : Mathieu Vicard, Directeur Général de l'agence Adrénaline et membre de l'AACC.

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