AdTech : Quels sont les nouveaux formats publicitaires digitaux ?
Publié par Barbara Haddad le - mis à jour à
Fin effective des cookies tiers, utilisation de l'intelligence artificielle générative ou, encore, essor de la TV connectée... L'écosystème publicitaire devrait être fortement chahuté en 2024.
Elle se porte bien, la publicité digitale. En 2023, cette dernière a progressé de 9 % (cabinet Oliver Wyman pour le SRI, février 2024) pour atteindre 9,3 milliards d'euros. Portée par le search (+11 %, à 4,1 milliards d'euros), le social media (+12 %, à 2,47 milliards d'euros) et le display (+6 %, à 1,78 milliard d'euros) - au sein duquel la vidéo représente 51 % des investissements - ainsi que par le retail media (+24 %, 1,11 milliard d'euros), la croissance de la publicité numérique bénéficie surtout aux GAMAM, les plateformes Google, Meta et Amazon, en tête. Dynamique, le secteur évolue sans cesse. " La publicité se diversifie dans les formats, pour s'adapter à la fois aux contraintes liées aux différents écrans et aux espaces de diffusion" , observe Prachya Butsiri, directeur conseil chez Gamned!, agence de publicité digitale, qui voit notamment fleurir les formats verticaux.
La publicité s'adapte aussi aux contraintes législatives et aux demandes des consommateurs. Le sujet du respect des données personnelles collectées a ainsi été, et sera encore en 2024, un élément central des stratégies de communication, d'autant que 43 % des personnes interrogées affirment être prêtes à délaisser leur marque préférée au profit d'une autre marque capable de gérer correctement la confidentialité de leurs données (source : étude Marketing 2024, Google). Dans ce contexte, " il faut continuellement innover pour proposer aux annonceurs des formats qui viendront nourrir à la fois la notoriété, une image moderne de la marque et de l'engagement" , explique Vincent Legros, head of studio chez Teads France et Belgique.
Marc Fischli, managing director EMEA chez Criteo, va dans le même sens : " Les prochains mois vont être déterminants pour l'ensemble de notre écosystème publicitaire, qui va connaître de grandes transformations en 2024. Cela va générer de réelles opportunités de se réinventer pour proposer des assets plus créatifs et plus engageants, au bénéfice de l'expérience client, mais sans perdre en performance. La créativité et l'innovation, dans le fond comme dans la forme, devront ainsi rester les maîtres-mots de tout ce qui sera entrepris."
Vers un nouveau paradigme "content centric"
2024 marque la fin des cookies tiers dans le navigateur Chrome de Google, conduisant les annonceurs à se tourner vers de nouvelles formes d'identification, mais aussi de ciblage, non plus centrées sur les utilisateurs, mais sur les contenus, notamment. "Les formats publicitaires évoluent dans ce sens, pour proposer des assets immersifs, qui se fondent avec de plus en plus de cohérence, et de façon non intrusive, dans les différents contextes éditoriaux (ads in-read, in-game). Le challenge est alors de ne surtout pas impacter le contrat de lecture ou le temps de jeu, par exemple" , détaille Antoine Ripoche, regional manager France d'Azerion, plateforme publicitaire omnicanale et cookieless. Geoffrey Berthon, CEO et fondateur de Qwarry, plateforme de ciblage digital et sémantique, complète : " Nous allons chercher à cibler l'audience derrière le contenu. Il faut donc définir avec le plus de précision possible l'empreinte sémantique de chaque contenu digital, à savoir de quel(s) sujet(s) le contenu parle et avec quelle tonalité, par exemple."
Cette quête de contextualisation s'étend aussi bien aux formats texte, vidéo qu'audio. Illustration avec la marque eBay qui a récemment diffusé un spot audio, avec AudioM et Azerion, sur des accessoires automobiles... au sein d'un ensemble de jeux mobiles affinitaires. En audio, la tendance est aussi à une personnalisation géolocalisée des contenus : " C'est ce qu'on appelle la dynamic creative optimization (DCO), utilisée déjà depuis un certain temps en display et qui s'étend aujourd'hui au format audio" , explique Kamel El Hadef, cofondateur d'Audion, adtech dédiée à la publicité audio digitale. Ainsi, un même spot sera décliné en plusieurs versions locales : en fonction de la région, du magasin ou, encore, de la météo ou de l'heure de diffusion.
eBay a diffusé un spot audio sur des accessoires automobiles au sein d'un ensemble de jeux mobiles ciblant les hommes de 25 à 35 ans.
Des formats vidéo de plus en plus dynamiques
Les contenus vidéo s'enrichissent pour leur part de fonctions interactives, pour s'adapter, notamment, à un mode de visionnage sur mobile, sur lequel l'enjeu des marques est de parvenir à arrêter le scroll des utilisateurs et à capter leur attention. " Les innovations créatives vidéo se multiplient au fur et à mesure que les nouvelles technologies le permettent : personnalisation de la couleur d'un objet directement sur la publicité, possibilité de visionnage en 360° ou, encore, apparition d'un habillage dynamique autour de la vidéo pour en faire un véritable écrin éditorial" , détaille Gaëtan Mathieu, head of marketing chez Equativ, spécialiste de la publicité en ligne.
Une récente étude menée par Kantar pour Amazon Ads confirme que les publicités vidéo interactives sont 1,4 fois plus susceptibles d'avoir un impact positif sur le gain de notoriété (brand lift). La publicité innove aussi en intégrant de la réalité augmentée (AR), utilisée comme une proposition d'essayage virtuel "in ads" ! C'est ce qu'ont imaginé récemment l'adtech Teads et Perfect Corp., spécialiste de l'AR, pour la maison Christian Dior Couture avec la campagne Rose des vents. Un format Virtual Try-On intégré à la vidéo a permis aux internautes d'essayer virtuellement des boucles d'oreilles au sein d'un environnement média premium et qualifié. L'impact a été très positif, tant en matière de souvenir publicitaire (+43 %) que de perception de la marque (+17 % des interrogés qualifient la marque de premium) et d'engagement (+36 % d'intentions d'achat).
L'IA au service de la création publicitaire
En parallèle de ces innovations, la façon de créer et de gérer la publicité en ligne se modifie à mesure que l'utilisation de l'intelligence artificielle se démocratise, permettant d'accélérer les processus créatifs tout en optimisant les coûts. L'utilisation de l'IA générative permet ainsi de décliner facilement et rapidement de multiples assets créatifs de façon automatique. En ce sens, Amazon Ads a, par exemple, lancé aux États-Unis, un outil de génération d'images pour simplifier la création de visuels lifestyle au sein de campagnes sponsorisées ("sponsored brands"). Ainsi, un objet peut être rapidement détouré, puis inséré dans un décor. Google, de son côté, a annoncé l'intégration de son IA Gemini pour Google Ads : les annonceurs peuvent générer du contenu publicitaire à la volée (images, titres, descriptions) en indiquant simplement leur site Web.
Des innovations pertinentes, mais qui soulèvent des questions juridiques. " Puisque les contenus d'images et de textes générés par l'IA sont en réalité un mashup de contenus déjà existants, quid des droits d'utilisation ? s'interroge Vincent Legros. Aux marques de prendre des mesures pour s'assurer que les assets générés sont libres de droits !" , conclut-il. L'utilisation de l'intelligence artificielle en publicité permet aussi l'émergence d'une nouvelle façon de pousser du contenu sponsorisé, de façon plus conversationnelle. C'est ce que propose Amazon avec un assistant d'achat doté de l'IA générative. Placé directement sur les fiches des produits, il permet d'accéder à des informations supplémentaires, de comparer les produits ou encore, de recevoir des suggestions personnalisées. L'utilisation de l'IA va donc permettre progressivement de pousser du contenu personnalisé en temps réel, en fonction de l'expérience utilisateur.
Plateformes sociales, en quête d'optimisation
Du côté des plateformes sociales, le temps passé chaque jour sur les réseaux sociaux se stabilisant, l'objectif d'optimiser la visibilité des éléments postés est de plus en plus exacerbé. Les plateformes imaginent donc de nouvelles solutions qui consistent, par exemple, à proposer des emplacements premium. C'est la stratégie de Snapchat qui donne la primeur aux annonceurs au travers de dispositifs "First" : First Commercial et First Lens où les annonceurs peuvent réserver la première publicité non skippable de six secondes dans les Shows Snapchat ou la première Lens AR sponsorisée qu'un Snapchatter voit dans le carrousel des Lenses ; et plus récemment, First Story, pour réserver la première publicité qu'un Snapchatter voit entre les Stories d'amis. En France, le premier partenaire à diffuser ce type de publicités First Story a été McDonald's, dans le cadre de sa campagne 1 jour, 1 bon plan . " Cette nouveauté permet de diffuser un message publicitaire auprès d'une très large audience sur une seule et même journée" , explique Philippe Tanant, product marketing manager chez Snap.
McDonald's France a choisi Snapchat pour maximiser la notoriété de sa vague de promotions annuelles "1 jour, 1 bon plan", via le format First Story. 9,13 millions d'utilisateurs uniques ont été touchés.
Chez Meta, la stratégie est à optimiser les offres poussées dans un même contenu, notamment grâce aux Collections ads, pour lequel un visuel, ou une vidéo, est accompagné d'images plus petites que l'on peut faire défiler, ou avec les Carrousels Multi-Destinations Reels, qui peuvent renvoyer, en call-to-action, vers plusieurs pages. Enfin, la tendance évolue vers également une recherche d'optimisation du tunnel de conversion. On observe donc de nouvelles initiatives comme la récente campagne Seamless commerce imaginée par Teads pour Sephora avec un "shoppable carrousel" où, lorsque l'utilisateur clique sur la publicité, le produit est directement ajouté au panier : " Ce dispositif permet à Sephora de réduire à un clic le parcours utilisateur entre l'affichage publicitaire et l'ajout au panier" , expliquent les équipes de Teads, rejointes par Sami Ennaifer, omnichannel media & performance marketing director, Europe & Middle East chez Sephora : " Ce dispositif nous a permis d'augmenter considérablement nos ventes en ligne, tout en communiquant sur un environnement premium et brand safe pour nos consommateurs."
L'essor de la CTV
Enfin, la publicité digitale s'étend aujourd'hui des écrans d'ordinateurs et de mobiles à celui de la télévision. Cela se traduit, entre autres, par de l'affichage publicitaire lorsqu'on allume son téléviseur connecté, comme chez Samsung qui propose le format "Sponsored Row" : " Situé à côté des recommandations vidéo organiques personnalisées pour les téléspectateurs et du contenu récemment visionné par ces derniers, ce format met en avant un contenu de premier plan et offre ainsi une nouvelle voie pour promouvoir de nouveaux contenus télévisés, qui pourraient autrement passer inaperçus, tant le rythme des sorties s'est accéléré" , explique Antonia Faulkner, head of marketing & analytics Europe de Samsung Ads.
C'est aussi le développement de la publicité sur les plateformes de streaming : Netflix, Disney+ et, plus récemment, Prime Video... L'objectif étant d'aller chercher les annonceurs de la TV linéaire : 84 % des experts média interrogés s'accordent à dire que le transfert des budgets publicitaires de la télévision linéaire vers la télévision connectée (CTV) va s'intensifier (source : rapport IAS). Enfin, on constate l'émergence de QR code personnalisé intégré directement dans le spot TV, pour créer du "drive-to-web" et générer de l'engagement, comme l'a récemment testé la marque de maroquinerie haut de gamme Coach.