La rentrée de tous les dangers pour les imprimés publicitaires
Publié par Barbara Haddad le - mis à jour à
Mise en place du dispositif OuiPub à la rentrée 2022, coût du papier qui s'envole, la rentrée s'annonce chaude pour les marques qui communiquent à l'aide d'imprimés publicitaires. Comment les marques opèrent-elles la mue de leurs catalogues et prospectus, nativement distribués en boîtes aux lettres ? Enquête.
En deux ans, le coût du papier a doublé. Une augmentation qui impacte directement le ROI des campagnes d'imprimés publicitaires. En parallèle, dès ce mois de septembre, le dispositif OuiPub est lancé pour trois ans. Un test qui concerne 13 communes et où les habitants doivent désormais apposer un autocollant spécifique sur leur boîte aux lettres pour continuer à recevoir de la publicité. “Cette mesure va concerner environ 10% des foyers, avec un avis plutôt favorable sur cette initiative (70% - source Bonial), même si, dans les faits, seuls un quart disent avoir l'intention d'apposer cet autocollant”, constate Laurent Landel, président de Bonial.
Le prospectus : un média de découverte et de soutien au pouvoir d'achat
Les promotions n'en sont pas moins attendues par les Français : face à l'inflation, 62% ont déjà changé leur comportement d'achat (source Mediapost x BVA) et pour 70%, les promotions sont importantes dans le choix des marques achetées (source Tiendeo). Pas étonnant alors que plus de 21,4% du chiffre d'affaires des hyper et supermarchés se fasse sous promotions (source NielsenIQ - 2021). “Le catalogue est un fabuleux levier de découvertes, il permet en quelques minutes de balayer des milliers d'offres et de sélectionner les 2 ou 3 qui nous intéressent vraiment”, analyse Rodolphe Bonnasse, CEO d'Aristid Retail Technology, spécialiste du “Retail Tech”. Une observation partagée par Franck Mathais, porte-parole de JouéClub : "Dans le secteur du jouet, le catalogue constitue un outil indispensable pour les familles, car il aide à préparer la liste au Père Noël. Celui de JouéClub comprend 2000 références et représente 30% du chiffre d'affaires annuel de l'enseigne. Du fait de son poids - les jeux et jouets sont réunis sur 400 pages - mieux vaut anticiper le coût des achats, notamment celui du papier !"
Vers une utilisation plus raisonnée du papier
Ni l'intérêt ni la performance des prospectus ne sont donc remis en question mais plutôt une démarche de moins en moins alignée avec la politique RSE des entreprises et des coûts croissants : “On constate par conséquent chez les annonceurs une nouvelle logique d'optimisation de l'utilisation du papier : réduction du nombre de pages ou encore du nombre d'envois. Certaines marques ont également remplacé le catalogue par un flyer agrémenté d'un QR code pour inviter les lecteurs à découvrir du contenu additionnel en ligne. Le papier reste un média très apprécié pour capter l'attention à l'heure de l'infobésité digitale mais il est désormais plutôt utilisé dans un mix média print et online”, partage Nicole Abenhaim, directrice générale adjointe chez Mediapost.
... et la digitalisation des catalogues et prospectus
En parallèle, les prospectus passent au format digital mais ce, de façon assez protéiforme. Pour certaines enseignes, il s'agit simplement de la mise en pdf du document tandis que pour d'autres, des versions plus interactives sont proposées, où l'on peut par exemple cliquer sur les produits et faire apparaître une fiche détaillée ou une vidéo. Enfin, d'autres encore vont même jusqu'à digitaliser leur catalogue dans un environnement plus immersif grâce à la réalité augmentée, où les produits sont mis en situation, C'est ce qu'a proposé Carrefour, en fin d'année dernière, pour son catalogue de jouets : “Nous souhaitions proposer une découverte inédite des produits du catalogue, afin d'aider les familles dans leurs décisions d'achat. Grâce à la réalité augmentée, ils ont pu ainsi voir les jouets prendre vie chez eux, en situation", confirme Aissatou Diallo, Head of Retail chez Snapchat.
Un nouveau challenge : celui de la visibilité des promotions en ligne
Tout l'enjeu pour les marques réside donc maintenant dans le fait de réussir à ce que leurs promotions soient aussi visibles qu'en boîtes aux lettres. Pour cela, une des premières actions engagées est celle de multiplier les mises en avant des promotions : site web, newsletter, application mobile, sms, réseaux sociaux. D'autres enseignes comme Auchan ont également préempté les nouvelles possibilités de communication proposées par les messageries instantanées telles que WhatsApp ou Messenger, où les utilisateurs peuvent demander à consulter le catalogue du magasin de leur choix directement au bot de l'enseigne puis à le recevoir chaque semaine. Autre levier actionné, celui d'une présence en ligne accrue “ Il faut pouvoir retrouver en digital la même communication de proximité qu'il y a avec le papier grâce à une approche data géolocalisée : les offres pourront ainsi être affichées en fonction de la région, des stocks du magasin le plus proche etc. Chez Mediapost nous proposons par exemple la création de catalogues personnalisés couplés à un ciblage géomarketing, ce qui permet de bien contextualiser les promotions”, explique Nicole Abenhaim. Un avis que partage Guillaume Cavaroc, Business Director - Retail & E-commerce chez Meta : “Facebook et Instagram sont de véritables médias de découverte. Aussi, proposons nous aux annonceurs de diffuser leurs publicités auprès d'un très large public mais également auprès d'audiences affinitaires et ultra qualifiées grâce aux nombreux critères de ciblages (sexe, géolocalisation, centres d'intérêt etc.) et à la publicité dynamique qui permet de proposer l'offre la plus personnalisée à chacun". On peut notamment citer les “Instant Expériences” qui permettent aussi d'afficher une sélection de produits personnalisée. Ce à quoi Rafel Lefèvre, client partner chez Meta ajoute : “Dans une culture de la performance, il est important de garder une certaine sensibilité pour la couverture et le nombre vues en complément du taux de clics. Ce n'est pas parce qu'une publicité n'est pas cliquée qu'elle n'est pas considérée, et les études d'incréments prouvent que les vues ont un impact significatif sur les incréments de vente générés”.
... et celui du bon dosage de la personnalisation !
“ Attention toutefois, car en ligne, les utilisateurs ne consultent en moyenne que les sept premières pages du catalogue digital mieux vaut donc optimiser ses chances de capter l'attention sur le début du catalogue !”, recommande Rodolphe Bonnasse. Ce à quoi ajoute Isabelle Wautelet, Directrice Marketing France pour Twilio, spécialiste de la communication client unifiée : “La relation client ne peut donc plus reposer uniquement sur le partage d'offres génériques. Face à des clients de plus en plus exigeants et à l'arrivée imminente de la fin des cookies tiers, les entreprises doivent se recentrer sur leurs données 1rst party et mettre en place une Customer Data Platform (CDP) pour qu'elles puissent être utilisées à des fins d'une expérience client plus personnalisée”. Pour autant, avant de tendre vers l'hyperpersonnalisation, il est déjà possible de s'orienter vers une meilleure contextualisation des messages comme l'évoquait Nicole Abenhaim un peu plus haut. C'est la mission que s'est donnée la société Teads : “Notre objectif est de rendre visible au mieux les offres des retailers en combinant qualité de contenu et qualité d'environnement de diffusion. Nous créons ainsi des formats publicitaires plus immersifs tout en sélectionnant des environnements éditoriaux premium”, explique Michel Bellanger, Global VP Retail Media de Teads. Reste alors à trouver le bon équilibre entre la personnalisation des offres et la part laissée pour de la sérendipité et continuer à découvrir des produits et services auxquels on ne s'attend pas !
L'avenir du prospectus : le catazine ?
Ainsi, force est de constater une certaine premiumisation du format papier, qui se veut désormais réservé à des communications à plus forte valeur ajoutée, avec un mix de contenus promotionnels et de contenus éditoriaux. C'est ce qu'a entrepris l'enseigne d'ustensiles de cuisine Alice Délice en proposant à ses clients le catazine, une initiative à la frontière entre le catalogue et le magazine, qui comprend à la fois des recettes, des témoignages et la mise en avant de produits. Dans le tourisme, chez VVF, la stratégie est de proposer deux catalogues : “Le premier magazine envoyé est très inspirant, en cohérence avec notre promesse “là où tout commence”, il invite à découvrir une région, des activités et donne des idées pour ses prochaines vacances. Le second se veut plus pragmatique, avec une description technique de chaque village, de façon optimisée : 4 destinations sont présentées par double page, ceci afin de réduire le nombre de pages et donc le coût d'impression et de distribution. Les catalogues sont également digitalisés pour être consultables en ligne, avec un site web qui a pour vocation à compléter les informations pour chaque destination”, confie Grégoire Mallet chez VVF.
“L'heure est donc à l'hybridation du catalogue papier, vers une communication plus phygital. Reste aux enseignes à inventer un nouveau contrat de lecture ainsi qu'un nouveau mix de communication pour diffuser leurs offres commerciales”, conclut Laurent Landel.