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Contrefaçon, concurrence déloyale, captation de données : Comment protéger sa plateforme digitale ?

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Engager des investissements pour développer son activité digitale suppose de s’interroger sur les possibilités qu’offre le droit de protéger lesdits investissements.

Comment valoriser les dépenses engagées pour les développements informatiques, la conception du site de sa charte graphique ? Comment empêcher le plagiat de concurrents malintentionnés ou l’extraction illicite de contenus ?

Il s’agit là d’autant de questions à prendre en compte dans le cadre d’une bonne gouvernance de l’activité online.

C’est ainsi que dans un jugement du 12 janvier 2017, le Tribunal de Grande Instance de Paris a été invité à se prononcer sur une action intentée par un site d’équipement automobile pour contrefaçon de droit d’auteur et concurrence déloyale.

Dans cette affaire, le demandeur reprochait à l’un de ses concurrents :

  • la reproduction quasi à l’identique de son site internet (arborescence, fonctionnalités, charte graphique, logo) au titre de la contrefaçon de droit d’auteur
  • la copie de son site à des fins de détournement de clientèle en ayant tiré indument profit de son expérience, de son savoir-faire et de ses investissements.
  • Dans une décision particulièrement motivée, le Tribunal rejette un à un ces griefs en rappelant de manière pédagogique un certain nombre de règles fondamentales à respecter en vue d’assurer une protection de son site Web.

    Règles n°1 &2: Justifier l’antériorité et la titularité des droits d’auteur

    Invoquer la copie de son site web implique d’être en mesure d’apporter la preuve que l’on est bien titulaire des droits sur cette œuvre.

    Cela suppose :

  • d’une part de démontrer une antériorité, c’est-à-dire que l’on est bien la personne copiée et non celle qui a copié. Pour cela, le propriétaire du site aura tout intérêt à fixer la preuve du lancement de son site par la réalisation d’un constat d’huissier ou de tout procédé d’horodatage équivalent. Ce constat figera la preuve du lancement mais également la preuve du contenu du site à un instant « t ».
  • d’autre part, de justifier de sa titularité. Dans le cas d’espèce soumis à l’appréciation des juges, il est constaté que le site avait bien été mis en ligne par la demanderesse, qu’elle édite bien ce site et qu’elle exploite le nom de domaine depuis une date non contestée « de manière paisible non équivoque». Au-delà des obligations de la loi pour la confiance numérique du 21 juin 2004 en matière d’identification, la rédaction de mentions légales complètes et détaillées sur son site Web trouve ici un autre intérêt.
  • Réflexes 

    Horodater son site lors de son lancement

    Rédiger des mentions légales détaillées.

    Règle n°3 : Démontrer l’originalité des différentes composantes du Site

    Si l’article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) précise que l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif opposable à tous, encore faut-il démontrer au préalable le caractère original de cette œuvre.

    C’est ce que rappelle en substance le jugement du 12 janvier 2017. Il est ainsi précisé que l’originalité s’apprécie « de manière globale de sorte que la combinaison des éléments qui la caractérise du fait de leur agencement particulier lui confère une physionomie propre qui démontre l’effort créatif et le parti pris esthétique portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur. »

    En l’espèce, le Tribunal refuse de reconnaître l’originalité du site de la demanderesse en observant que :

  • le logo n’est pas décrit de manière à justifier d’une quelconque originalité
  • la simple description de la Charte graphique ne permet pas d’attester de l’empreinte de la personnalité de son auteur et que cette charte est bien « le résultat d’une recherche esthétique et d’un effort personnalisé»
  • le site en lui-même ne révèle pas « un apport personnel qui relève l’empreinte de sa personnalité». Il est notamment indiqué que la demanderesse « ne justifie pas des choix qui ont présidé à l’ordonnancement des rubriques et à l’arborescence du site, à la mise en perspective des produits présentés , qui attestent plus d’un savoir-faire commercial commun à d’autres sites marchands qu’à un réel effort créatif, dès lors qu’ils permettent de naviguer aisément sur le site et répondent à un impératif utilitaire largement répandu pour le commerce en ligne »
  • Sur ce dernier point la décision est particulièrement éclairante quant aux principes qui sous-tendent la reconnaissance d’une protection par le droit d’auteur. Ainsi, par une simple analyse a contrario, cette décision permet de souligner l’importance :

  • D’acter du caractère original des logos utilisés. Formaliser un contrat de cession de droits d’auteur sur lesdits logos incluant une garantie de jouissance paisible pourra s’avérer ici déterminant.
  • De formaliser le savoir-faire mis en œuvre dans la conception du site, savoir-faire qui peut parfaitement être reflété par la combinaison originale de plusieurs éléments & fonctionnalités.
  • Réflexes 

    Systématiser les contrats de cession de droits sur les logos

    Formaliser un savoir-faire en mettant en avant le caractère original de la démarche (par rapport à la concurrence), caractère original qui doit dépasser le simple savoir-faire commercial commun à d’autres sites

    Règle n°4 : Justifier d’une identité propre et d’une forme de distinctivité

    Pour écarter le grief de concurrence déloyale, le Tribunal relève tour à tour que :

  • La contrefaçon ayant été rejetée, le grief de concurrence déloyale peut parfaitement être analysé
  • La concurrence déloyale suppose de démontrer « des comportements fautifs tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, ou ceux, parasitaires, qui tirent profit sans bourse délier d’une valeur économique d’autrui lui procurant un avantage concurrentiel injustifié, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements »
  • Dans cette affaire, la comparaison des deux sites révèle :
  • des différences importantes quant au langage, à l’architecture, aux dénominations des menus, au logotype, aux illustrations, aux noms des rubriques
  • des ressemblances limitées à des aspects standards, « que l’on trouve habituellement dans les sites marchands »
  • La distinctivité, critère habituellement employé pour reconnaître la valeur d’une marque est donc un élément clé. Car c’est bien par la définition d’une identité propre qui sort des présentations habituelles que le site pourra renforcer sa position en cas de plagiat.

    Réflexes 

    Opter pour une identité propre assurant la distinctivité de la plateforme

    Règle n°5 : Justifier d’investissements substantiels matériel, humain et financier

    Bien que non traitée dans le jugement du 12 janvier 2017, la question de la protection du producteur de base de données dont les droits sont prévus aux articles L.341-1 et s. du CPI, aurait pu être abordée dans cette affaire.

    En effet, tout propriétaire d’une plateforme digitale aura la possibilité, dès lors qu’il justifie d’investissements matériel, humain et financier de bénéficier d’une protection spécifique lui permettant d’interdire les extractions qualitativement ou quantitativement substantielles[1].

    Réflexes 

    Démontrer les investissements engagés pour bénéficier du statut de producteur de base de données

    Intégrer dans les CGU du site une interdiction d’extraction substantielle des données composant la plateforme

    Placer des dispositifs de marquage ou autres pièges

     

    Définir une stratégie digitale pertinente en ce qu’elle assure le développement d’une activité pérenne suppose la prise en compte du juridique dès la phase de conception.

    Formalisation du savoir-faire, gestion des droits sur les développements, antériorisation de l’exploitation du site, mise en place de dispositifs de marquage, rédaction de CGU et de mentions légales détaillées, dépôts de marques et de codes source, sont autant d’exemples de mesures à mettre en œuvre pour assurer la sécurité de la plateforme et la valorisation des investissements qui y sont attachés.

    L’audit juridique d’un site web existant permet d’opérer ce type de vérification il constitue une opération essentielle[2].

    Pour toute demande d’information concernant ces différentes prestations, contactez-nous ICI.

     www.haas-avocats.com

    [1] Cf. notamment http://www.haas-avocats.com/actualite-juridique/7-regles-simples-pour-proteger-et-valoriser-ses-bases-de-donnees/

    [2] http://www.haas-avocats.com/e-commerce/strategie-digitale-pourquoi-faut-il-auditer-votre-site-marchand/

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